Assistance et protection des voyageurs : dispositifs de crise

Agences de voyages, assisteurs médicaux, sociétés spécialisées dans la sûreté et la sécurité : pour assurer la protection de leurs voyageurs, les entreprises jouent sur des relations étroites avec une multitude d’acteurs.
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© BsWei/Shutterstock.com

Les sociétés ne sont pas seules face au devoir de protection de leurs employés. Une pléiade d’intervenants participe à rendre les déplacements professionnels plus sûrs. Pierres angulaires des déplacements, les agences de voyages d’affaires sont évidemment au cœur du système, puisqu’elles détiennent les informations clés sur les itinéraires tout en organisant le circuit de validation des déplacements. “Tout est intégré. Le collaborateur remplit son ordre de mission sur notre intranet, puis son manager valide le voyage, et le service administratif se charge ensuite des réservations avec l’agence FFT, le tout en lien avec notre assisteur International SOS, décrit Arnaud Kalika, responsable sûreté de Meridiam. Et si le pays est à risque élevé, je reçois une alerte pour m’assurer que toutes les mesures ont bien été prises.

En cas de problème, les solutions technologiques proposées par les agences ou les éditeurs d’outils de réservation participent activement au processus de sécurité en permettant de localiser les voyageurs à partir des informations sur les vols et les hôtels. Et ce, même en cas de réservation hors canal. “Notre solution TripLink donne la possibilité de rapatrier les voyages achetés en direct sur les sites des fournisseurs, décrit Marine Rivoire, experte Produits Travel chez SAP Concur. D’autre part, nous avons établi des liens avec des acteurs tiers. Par exemple, avec Uber for Business, nous récupérons les données à la fin des courses, ce qui est utile en cas d’alerte dans une ville.”

Selon SAP Concur, plus de neuf voyageurs sur dix (91%) ont partagé leur position géographique lors de leurs déplacements.

En parallèle, ces outils permettent aussi de communiquer avec les voyageurs : “Cela peut aller de messages d’information sur des manifestations à Paris au déclenchement d’un plan de localisation lors d’un attentat ou d’un tremblement de terre, poursuit Marine Rivoire. Dans ce cadre, des messages push sont envoyés par SMS et e-mail avec demande d’action de la part du voyageur : répondez “OK” si vous êtes en sécurité ou “Help” si vous avez besoin d’aide. La direction sécurité de l’entreprise pourra alors activer un plan d’assistance avec son fournisseur.”

Géolocalisation proactive, envoi d’informations et d’alertes sur la santé et la sécurité, communication d’urgence en cas d’incident : l’Assistance App d’International SOS relie les voyageurs aux entités chargées de sa sécurité. © International SOS
Géolocalisation proactive, envoi d’informations et d’alertes sur la santé et la sécurité, communication d’urgence en cas d’incident : l’Assistance App d’International SOS relie les voyageurs aux entités chargées de sa sécurité. © International SOS

Car aucune agence de voyages ne saura secourir un voyageur en cas de besoin. Selon leur taille, les entreprises associent à leur organisation plusieurs types d’acteurs, qu’ils soient spécialisés dans l’assurance et le médical comme Europ Assistance ou Mondial Assistance ou qu’ils aient un modèle intégré comme International SOS qui ajoute à son rôle d’assisteur une dimension sécurité grâce à son joint-venture avec Control Risks. Enfin, des intervenants au profil plus musclé font aussi partie des dispositifs tels Amarante, Anticip et SSF en France ou G4S et Securitas dans le monde anglo-saxon…

Ces sociétés, souvent fondées par d’anciens militaires ou membres de forces d’intervention, font valoir leurs réseaux et leur expérience du terrain pour sécuriser les déplacements dans des zones à risques. Directeur de l’information de SSF, Bernard Jacquemart explique qu’une part importante de l’activité de sa société est concentrée dans la zone sahélo-saharienne : “Cela va de l’escorte pendant les déplacements à la conception de plans de sécurité et à leur mise à jour. Mais les problèmes de violence ne sont pas limités à l’Afrique. À Haïti aussi, nous avons dû effectuer des évacuations à plusieurs reprises l’année dernière.

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Plus grande entreprise de sécurité privée avec ses 92 000 employés et partenaire d’EuropAssistance, GardaWorld fait aussi partie de ce cercle fermé d’acteurs déployés dans les zones sensibles. Son champ d’action s’étend de l’information aux voyageurs – notamment avec sa filiale Crisis24, dont le portail en ligne fournit des actualités en continu – à la sécurisation des déplacements et la gestion de crise. “En 2018, nous avons aussi acquis NYA, spécialisée sur les kidnappings”, remarque Grégoire Pinton, chef mondial des services de sécurité des voyageurs de cette société.

Spécialisée dans l’assistance médicale et l’assurance voyage, Europ Assistance est amenée à gérer les crises en liaison avec les agences de voyages ainsi qu’avec, en ce qui concerne la sécurité, son partenaire GardaWorld.©Europ Assistance
Spécialisée dans l’assistance médicale et l’assurance voyage, Europ Assistance est amenée à gérer les crises en liaison avec les agences de voyages ainsi qu’avec, en ce qui concerne la sécurité, son partenaire GardaWorld.©Europ Assistance

À côté du risque terroriste, le kidnapping fait partie des grandes “tendances” actuelles, en particulier dans le golfe de Guinée et en Amérique Latine, sous-continent qui concentre 42 des 50 villes les plus violentes au monde. Tout en haut de ce glaçant tableau, le Mexique enregistre une moyenne de cinq enlèvements par jour. “Ça se finit rarement mal, rassure Arnaud Kalika, mais c’est un choc psychologique. Il n’y a d’ailleurs pas qu’au Mexique où les voyageurs représentent une manne financière à exploiter pour les criminels. C’est également le cas au Pérou, au Myanmar ou en Indonésie.

Sans garantie d’une totale efficacité, les professionnels énoncent quelques précautions d’usage à adopter pour éviter les incidents : regarder autour de soi avant d’entrer ou de sortir de voiture, être habillé de façon discrète – les voyageuses éviteront les colliers, parce qu’ils offrent une prise aux agresseurs -, être attentif dans la rue et ne pas être coupé du monde par des écouteurs, toujours avoir un peu d’argent sur soi afin de pouvoir le donner rapidement et sans résister. Surtout sans résister.

Cependant, même s’ils sont armés pour faire face aux situations critiques, les acteurs de la sécurité font de la prévention leur grand cheval de bataille. “Le but d’une société comme la nôtre est que les choses aillent bien”, résume Grégoire Pinton. Comme la plupart de ses confrères, pour GardaWorld, tous les moyens sont bons pour informer les voyageurs en partance sur les risques encourus : formations en e-learning, échanges virtuels via Skype, rencontres en face à face. De la même manière, les spécialistes du risque se chargent en amont de la mise en place de mesures de sécurité. “90 % des demandes de nos centres d’assistance relèvent de la prévention”, remarque également Xavier Carn.

Parmi les questions qui guideront l’assisteur dans ses conseils : en arrivant, le voyageur va-t-il se rendre à son hôtel en taxi ou faut-il une escorte ? La sécurité de l’hôtel a-t-elle été auditée récemment ? Y a-t-il des tensions actuellement dans le pays ? Tel quartier de la capitale où le voyageur doit se rendre présente-t-il des risques spécifiques ? Le voyageur restera-t-il, ou non, dans un contexte urbain ?

Si les risques ne semblent jamais avoir été aussi élevés, la technologie compense en partie les affres des bouleversements géopolitiques. À ce titre, le smartphone des voyageurs se métamorphose en fil à la patte sécurisant pour le voyageur. Que ce soit Anticip avec son application Travel Risk Management, GardaWorld avec Crisis Messenger, International SOS avec Travel Tracker, Iremos avec son application d’alerte de masse Connect, SSF avec Locator, les spécialistes du risque ont développé des solutions permettant l’envoi d’informations ou de messages d’alerte aux voyageurs qui, en retour, peuvent demander une assistance.