Bollywood : 3,3 milliards d’entrées

Avec 1 200 nouveaux films par an, l’industrie du cinéma indien a de beaux jours devant elle… malgré bien des bouleversements.

Bollywood se porte bien, très bien même. En 2011, le chiffre d’affaires de l’industrie des médias et du divertissement s’y élevait à 778 milliards de roupies, soit environ 11 milliards d’euros selon les chiffres communiqués par la mission économique française à Bombay. “Ce qui fait marcher Bollywood, c’est un cinéma en hindi qui rallie un pays d’un milliard deux cent mille âmes et d’une vingtaine de dialectes différents”, explique Shauket Kahn.

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Et Shauket Kahn en connaît un rayon sur le cinéma indien. Fils de Mehboob Kahn, le très célèbre et très révéré réalisateur de Mother India, il a grandi parmi les bobines de 35 mm et les stars des années 50. Directeur des studios construits en son temps par son père, il a vu l’industrie se transformer au fil des décennies. “Les trentenaires d’aujourd’hui ont voyagé. Ils ont fait leurs études à l’étranger, ont accès à internet et à toutes sortes de médias. Alors les goûts changent et les douze chorégraphies du Bollywood traditionnel disparaissent au profit de sujets polémiques et d’un cinéma plus cérébral”, constate Shauket Kahn.

Il est vrai qu’une population constituée à 70 % de moins de 35 ans ne peut générer qu’une forte demande pour les toutes dernières tendances. Bien que les beaux jours de thèmes du genre “une jolie jeune fille enlevée par un voyou et recueillie par un brave homme au coeur tendre”, avec force danses et chants, ne soient pas encore tout à fait comptés, un vrai cinéma d’auteur émerge et l’on ne compte plus les figurants et acteurs étrangers qui peuplent désormais les écrans indiens. Inutile de fouiller longtemps dans les archives pour en trouver un exemple. Le plus récent, Ishkq in Paris, en salle en novembre 2012, raconte l’histoire d’une rencontre passionnelle dans un train entre Rome et Paris. L’héroïne, une jeune francoindienne jouée par l’actrice Preity Zinta, a pour mère… Isabelle Adjani.

C’est peut-être ce début d’ouverture au monde qui permet aux productions indiennes de conserver 80 % du marché national, loin devant celles d’Hollywood, le reste n’étant qu’anecdotique. Et les Indiens, pauvres comme riches, continuent de fréquenter les salles obscures. En 2011, environ 3,3 milliards de billets ont été vendus, soit 2,75 séances par habitant. Pourtant, le développement des multi plexes à l’Américaine commence à peser lourd sur les porte-monnaie, avec un prix moyen situé autour d’un euro la place. Une vraie somme pour certains.

Ciment de la nation

Mais on l’a dit, Bollywood se porte comme un charme. Et s’exporte, de surcroit. En effet, l’Afrique, la Russie et certains pays d’Asie sont de plus en plus friands de ses productions, tandis que le Canada, les États-Unis et le Royaume-Uni, où se concentre une forte diaspora indienne, en consomment à tout va. “Pourtant, le cinéma n’a plus le monopole à Bollywood”, explique Vivan Bhatena, ancien Mister India et acteur à la filmographie déjà bien longue pour un si jeune trentenaire. “La télévision et la publicité constituent désormais une part importante des tournages”, raconte-t-il. Aujourd’hui, l’Inde compte près de 600 millions de téléspectateurs et plus de 500 chaînes, avec un fort potentiel de développement, puisque seuls 138 millions de foyers sont équipés d’un téléviseur. “Une carrière à Bollywood ne se cantonne plus à des chorégraphies clichés. Je suis passé du mannequinat aux clips vidéo en passant par le théâtre et la télévision”, confie Vivan Bhatena. Si l’abondance des canaux de diffusion a probablement un peu dilué la passion des Indiens pour leur cinéma, Bollywood reste encore, comme le cricket, le “liant de la nation”. Parole d’ancien Mister India.