
Les croisières ne connaissent pas la crise, traversant vent debout les embruns économiques. Selon la Cruises International Association (Clia), “2013 a été une année record pour l’industrie de la croisière, notamment en Europe où 6,4 millions de passagers ont été comptabilisés, soit une augmentation de + 43 % par rapport à 2012”. À elle seule, la France a enregistré une hausse de 9 %. Pour la première fois de son histoire, ce marché a franchi la barre symbolique du demi-million de passagers et se place désormais au quatrième rang européen. 2014 s’annonce du même tonneau. Les 63 compagnies membres de la Clia prévoient d’accueillir 21,7 millions de passagers dans le monde, dont 6,54 millions d’Européens. Cette croissance devrait encore se poursuivre sur le long terme puisqu’entre 2014 et 2018, elles mettront à flot 36 nouveaux navires qui viendront compléter l’offre.
Désormais, la croisière s’adresse à tous, quels que soient la catégorie socioprofessionnelle, l’âge ou les centres d’intérêt. Yachts luxueux, voiliers à taille humaine, catamarans intimistes, navires de rêve, paquebots aux ambiances décontractées… les choix sont infinis. À bord, l’accueil équivaut au niveau de prestations et de services d’un bon hôtel, voire d’un palace sur certains. L’unité de lieu, une grande variété de paysages et d’activités proposées, le tout sans défaire sa valise ont eu vite raison des plus récalcitrants. D’autant que, côté MICE, un grand nombre de bâtiments possèdent des salles de réunion, voire de véritables centres de congrès et amphithéâtres. Et quand ils n’en disposent pas, ils offrent de multiples espaces qui se transforment facilement en salle de conférence ou de cocktail, tels les bars, les salons ou les ponts-piscine.
Cap sur la France
En France, la multiplication des ports d’embarquement et l’implantation de têtes de ligne à Marseille, Toulon, Nice, Dunkerque, Le Havre, Calais ou encore à Bordeaux pour les croisières fuviales a permis d’augmenter les départs et de stimuler la demande. Progressivement, l’Hexagone rattrape son retard, tout en restant encore loin derrière l’Allemagne ou les États-Unis. Côté destination, la Méditerranée est la première à bénéficier de cet enthousiasme des Français pour les vacances sur l’eau, 64 % des croisiéristes embarquant au départ des ports français, italiens ou espagnols. L’autre grande tendance, ce sont les fjords norvégiens, en été, en partance des ports du nord de l’Europe, Copenhague ou Amsterdam.
Cinq mâts au charme exclusif, le Club Med 2 embarque plus de 370 passagers sur les mers du monde ; la Méditerrannée en été, les Caraïbes l’hiver.
Cours circuits
Ces départs de – relative – proximité ont pour avantage de réduire les frais et surtout le temps d’acheminement, éléments importants pour toucher les événements d’entreprise, surtout lorsqu’il s’agit de mini croisières de trois à six jours ! Bon nombre de compagnies proposent d’ailleurs dans leurs catalogues des circuits courts. C’est le cas par exemple de Costa qui recense une cinquantaine de mini croisières au départ de Nice et de Marseille avec pour itinéraire Barcelone, Palma de Majorque, Ibiza, Ajaccio et Savone. “Elles ont été mises en place essentiellement pour la clientèle affaires”, précise Georges Azouze, PDG de Costa Croisières France qui rajoute que “les circuits de trois à quatre jours sont les plus demandés.”
La compagnie maritime italienne possède 27 paquebots correspondant à une capacité globale d’environ 70 000 hôtes. Trois autres bateaux sont actuellement en construction. Parmi ces derniers, le Diadema, lancé cet automne, pourra accueillir 5 000 passagers et proposera des départs à partir de Marseille durant l’hiver. Toute l’année, ce sont 13 navires Costa qui sillonnent la Méditerranée et l’Atlantique proche, proposant régulièrement de nouveaux itinéraires comme la “route des Canaries” au départ de Casablanca avec deux jours et une nuit à Madère.
Croisières de France présente également au printemps et à l’automne des programmes de trois ou quatre jours parfaitement adaptés à la clientèle affaires au départ de France. Ce spécialiste des croisières francophones et tout inclus, vient de renforcer sa flotte avec le Zénith, bateau de 721 cabines qui démarre l’été en Méditerranée, puis navigue l’hiver au Brésil. En 2015, une deuxième unité sera opérationnelle : le Century. Plus haut de gamme que le Zénith, il compte attirer les groupes de tourisme d’affaires avec des infrastructures et des services de qualité.
1 — Une vingtaine de restaurants et bars, des activités à foison, du WiFi partout, des salles de réunion et même un amphithéâtre : les villes flottantes de Royal Caribbean sont taillées pour les événements de 16 à 1400 personnes.
Vastes géants des mers
La compagnie Royal Caribbean renforce également sa flotte, déjà forte de 22 navires de grande capacité. Fin 2014 sera inauguré un nouveau géant des mers, le Quantum of the Seas : 8 000 passagers et membres d’équipage, 1 540 cabines avec balcon, des activités uniques en mer comme le parachutisme et le plus grand complexe sportif et de loisirs flottant… ou encore une étonnante capsule en verre qui emporte les passagers à 90 mètres au-dessus de l’eau pour une vue impressionnante à 360° ! Le paquebot débutera sa saison hivernale à New York, puis prendra ses quartiers à Shanghaï à partir d’avril pour des croisières de trois à huit nuits. Autre nouveauté de la compagnie : l’Oasis of the Seas, d’une capacité de 5 400 passagers, fera pour la première fois une mini saison en Europe en septembre, au départ de Barcelone. “Il est plus généralement basé aux Caraïbes pour des croisières de 8 jours/ 7 nuits, tout comme l’Allure of the Seas d’ailleurs”, indique Géraldine Farel, responsable du service marketing de Royal Caribbean. À noter aussi qu’en 2015, l’Allure of the Seas fera, là aussi pour la première fois, une saison complète en Méditerranée. Mais outre la taille gigantesque de ses navires, l’une des caractéristiques de Royal Carribean est de proposer à bord des activités originales : spectacle sur glace, simulateur de surf ou encore un ring de boxe !
À côté de ces mastodontes, des compagnies de taille plus modeste jouent sur le cachet de leur bateau ou le caractère insolite de leur croisière pour attirer les organisateurs d’événements. Ainsi Hurtigruten accueille jusqu’à 40 personnes à bord de l’express côtier longeant la côte norvégienne. Et encore moins sur le M/S Fram, son bateau d’exploration des régions polaires, dont les croisières exceptionnelles sont à réserver longtemps à l’avance !
Celles proposées à bord du voilier Le Ponant de la compagnie éponyme ne sont pas moins courues. Ce trois mâts de 32 cabines vogue l’hiver aux Caraïbes et l’été en Méditerranée. “Si aujourd’hui la clientèle MICE représente 7 % de notre chiffre d’affaires, nous comptons la doubler d’ici peu”, confe Hervé Bellaiche, directeur commercial. Pour tenir son objectif, la compagnie a multiplié par deux la taille de son service affrètement et MICE, édité une brochure spécifique, proposé des croisières de trois à quatre nuits et revu totalement son offre pour la rendre la plus flexible possible. Au sein de sa flotte, la compagnie compte aussi trois méga-yachts de 132 cabines et suites – un quatrième, le Lyrial, les rejoindra en 2015 – qui, tout comme Le Ponant, sont régulièrement affrétés par les groupes affaires pour des mini croisières de trois nuits. La compagnie a par exemple organisé récemment un itinéraire sur mesure entre Marseille et Nice avec en escale une visite en V.T.T. de l’île de Porquerolles et une découverte pédestre de St Tropez.
2 — Croisières de France programme de nombreuses mini-croisières en Méditerranée et mer du Nord adaptées à la clientèle affaires et agrémentées d’activités ludiques.
3 — En plus de son express côtier allant de Bergen au cercle polaire, Hurtigruten, la compagnie norvégienne, organise des croisières d’exploration, véritables expéditions au milieu des glaces du Grand Nord.
Expérience unique
Les croisières plus longues, celles en Antarctique, en Arctique ou encore en Patagonie, enregistrent surtout de fortes demandes de la part des particuliers. En effet, leur durée comme leur coût élevé freinent le secteur MICE. Pourtant, au vu de leur caractère insolite et de l’expérience unique qu’elles permettent de vivre, elles marquent les groupes incentive qui ont eu la chance d’y participer. Le charme des voiliers quatre mâts tels les Star Flyer et Star Clipper ou le quatre-mâts Royal Clipper opère infailliblement sur les participants. “La clientèle MICE représente selon les années entre 35% et 50% de notre chiffre d’affaires”, affrme Béatrice Frantz-Clavier, responsable commerciale France de la compagnie Star Clippers. Ces voiliers, qui naviguent l’hiver dans les Caraïbes et au Costa Rica, prennent leurs quartiers en Méditerranée au printemps. Ils assurent un service VIP, des programmes sur mesure et une navigation à la voile dès qu’il y a du vent !
Sur le cinq mâts Club Med 2, les groupes embarquent toute l’année pour des croisières de trois à quatre jours l’été en Méditerranée et en Europe du Nord et l’hiver aux Caraïbes. À bord, 200 membres d’équipage pour 370 passagers, des prestations sur mesure, un accueil haut de gamme, des espaces transformables en salles de réunions… “L’été, nos croisières représentent 16 % de l’activité business du groupe Club Med et 2 % l’hiver”, souligne Sophie Amos, responsable marketing. Parmi les itinéraires, les croisières France- Corse sont plébiscitées. Viennent ensuite les nouvelles propositions comme les croisières en Europe du Nord et en particulier en mer Baltique.
Fleuves tranquilles
Les bateaux offrent aussi un beau potentiel sur les fleuves et voies navigables, en particulier en France. Voguer tout en douceur, admirer les paysages défilant sous les yeux, s’arrêter ici ou là pour visiter des villages et partir à la rencontre des gens séduit de plus en plus de clients. Loin des paquebots “centres de loisirs”, les bateaux de croisières fluviales s’apparentent plus à des hôtels restaurants flottants. La France, qui possède le plus long réseau fluvial exploitable en Europe, voit chaque année sa clientèle augmenter. En attendant l’ouverture en 2017 du canal Seine-Nord Europe, reliant le Rhin, le Danube et la Seine, et qui ouvrira la porte à de nouveaux itinéraires comme Paris-Amsterdam.
Les croisières varient de quelques heures, pour celles ne proposant pas d’hébergement, à plusieurs jours pour les bateaux-hôtels. Généralement, les compagnies fluviales présentent des formules tout inclus, excursions comprises. Leurs salons-bars se transforment vite en salles de réunion, tandis que leurs ponts et restaurants peuvent servir d’écrin à des cocktails ou des dîners. Selon l’Observatoire du tourisme fluvial en Ile-de-France, en 2012 les croisières promenades ont transporté 7,63 millions de passagers sur les voies navigables de la région, Paris compris. L’institut constate aussi que la clientèle française est en hausse (+5 %) et explique ce résultat par une diversification de l’offre, la plus forte croissance ayant été enregistrée par le segment de la croisière avec hébergement sur l’axe Seine, avec +30 % du nombre de passagers.
Tyrolienne, murs d’escalade, simulateur de surf… L’Allure of the Seas, de la Royal Caribbean, promet des sensations fortes.
Afin de renforcer ce dynamisme, les Ports de Paris ont créé avec ceux du Havre et de Rouen un groupement d’intérêt économique, dénommé Haropa. Ce dernier s’affiche aujourd’hui comme le troisième port d’escale sur la façade Manche/Mer du Nord, derrière Hambourg et Amsterdam. Il contribue également à rendre attractif l’axe de la Seine.
Dans la capitale française, les deux grands opérateurs de croisières promenades sont rompus aux attentes de la clientèle affaires. Ainsi les huit bateaux des Yachts de Paris présentent des balades thématiques culturelles (musées, jardins, oenologie, cuisine, architecture…) pour des groupes allant jusqu’à 1 300 personnes. La dernière proposée portait sur l’art contemporain. Parallèlement, l’aménagement du port de Javel lui permettra d’accueillir à terme 1 750 invités. Non loin de là, au pied de la tour Eiffel, les Bateaux parisiens proposent diverses formules de croisières à bord de leurs 12 bateaux panoramiques, dont les Diamant II et Cristal II, d’une capacité respective de 340 et 260 passagers.
Dimension humaine
La facilité logistique, la proximité des lieux à visiter, la situation centrale des ports au coeur des villes, la souplesse de la durée de la croisière sont autant d’arguments pour les organisateurs MICE. CroisiEurope, le leader de la croisière fluviale en Europe, dispose de 34 navires et péniches naviguant en Europe. Par exemple en France, sur la Seine, le Rhône, la Saône, la Gironde, la Moselle et le Rhin, mais aussi en Italie sur le Pô et en Espagne sur le Guadalquivir. “La petite capacité de nos bateaux, de 8 à 200 passagers, leur donne une dimension humaine, propice aux échanges”, affirme Éric Collange, directeur commercial France.
Paris, un roman-fleuve d’art et d’histoire à lire au plus près de l’eau (ici le Cachemire, des Yachts de Paris).
La flotte, très moderne, est parfaitement équipée pour recevoir les événements. D’autant que les programmes peuvent se faire à la carte, tout comme la personnalisation du bateau. Il sufft simplement de réserver à l’avance. Depuis ce printemps, trois autres péniches – Madeleine, Raymonde et Anne-Marie – naviguent désormais sous pavillon CroisiEurope sur les canaux d’Alsace, de Bourgogne, de Provence, de Champagne et à Paris. Elles disposent de onze cabines, parfaites pour
des petits séminaires ou des réunions de comité de direction. D’autre part, depuis cette année, loin, très loin de l’Europe, quatre bateaux embarquent les passagers pour des croisières de rêve sur le Mékong, entre Vietnam et Cambodge, de Siem Reap à Hô Chi Minh.
Dans ces pays, le groupe Belmond, l’un des spécialistes du tourisme de luxe anciennement connu sous le mythique nom d’Orient Express, joue sur l’aspect prestigieux de la destination et la convivialité du bateau et des activités. Sur le fleuve Irrawady, en Birmanie, Belmond programme des croisières à bord de deux superbes bateaux : le Road of Mandalay, équipé de 43 cabines, et l’Orcaella, de 25 cabines. “Nous privilégions les affrètements avec trois nuits minimum à bord, l’idéal étant cinq nuits !”, estime Yann Guezennec, directeur marketing. Présent en Birmanie depuis 20 ans, Belmond peut organiser des programmes hors du commun : arrêt sur un banc de sable au milieu de nulle part le temps d’un match de foot improvisé avec des villageois, illumination du fleuve par des milliers de petits radeaux portant des bougies, cocktails sur le pont d’observation… et aussi des actions humanitaires telles que la participation à la construction d’écoles ou d’hôpitaux. “Nous sommes engagés dans une politique de développement durable et impliqués de manière forte dans ce pays”. De leur propre chef, un grand nombre d’entreprises demandent à participer à ces actions. Un argument de plus pour inciter à embarquer.
En Birmanie, les Road of Mandalay et Oracella filent un train de sénateur le long de l’Irrawady. Deux bateaux à l’atmosphère de palace intimiste signée Belmond, anciennement Orient Express.
Rhin, Rhône, Pô, Danube… Sillonnant les fleuves du Vieux Continent, CroisiEurope donne du temps au temps aux événements ; le temps de la visite, mais aussi de la réflexion dans un environnement haut de gamme.
Croisières : l'appel du large
- Croisières : l’appel du large
Rencontre avec Cédric Rivoire-Perrochat, directeur général France de CLIA