
Où se situent les entreprises françaises sur le chemin de l’écomobilité ? Quels sont les freins qui ralentissent cette transition vers des déplacements plus vertueux ? Quel a été l’impact de la crise sur l’engagement des dirigeants ? Voilà les principales questions abordées par le webinaire qu’organisait mardi OpinionWay. Une conférence en ligne qui s’appuyait sur une étude menée au printemps avec Ecomob.Club – un club en ligne de 500 décideurs d’entreprises – et sur l’expertise de Jérôme Fouque et Yann Barbizet (Corporate Mobilities). Le tout nourri par les retours terrain de Mélaine Pouchain, responsable mobilité, déplacements et environnement...
Où se situent les entreprises françaises sur le chemin de l’écomobilité ? Quels sont les freins qui ralentissent cette transition vers des déplacements plus vertueux ? Quel a été l’impact de la crise sur l’engagement des dirigeants ? Voilà les principales questions abordées par le webinaire qu’organisait mardi OpinionWay. Une conférence en ligne qui s’appuyait sur une étude menée au printemps avec Ecomob.Club – un club en ligne de 500 décideurs d’entreprises – et sur l’expertise de Jérôme Fouque et Yann Barbizet (Corporate Mobilities). Le tout nourri par les retours terrain de Mélaine Pouchain, responsable mobilité, déplacements et environnement de travail chez Metro, et d’Emmanuel Guédon, chef d’entreprise chez Animis Ressources Humaines.
une prise de conscience est en train de se mettre en place sur cette notion d’écomobilité
D’après les données récoltées par OpinionWay, le bilan de l’écomobilité en 2021 reste partagé. Une personne sur deux (48%) estime ainsi qu’une politique en ce sens est déjà mise en place ou est en cours de déploiement dans son entreprise. Dans un quart des cas (25%) la réflexion à ce sujet n’est simplement pas engagée. Mais pour Yann Barbizet, « globalement, il y a une prise de conscience qui est en train de se mettre en place sur cette notion d’écomobilité ».
Chez Métro, Mélaine Pouchain décrit quelques-unes des étapes déjà franchie depuis trois ans, à commencer par la création d’un comité mobilité intégrant toutes les parties prenantes, puis la mise en place d’un système d’autopartage, et la mise à disposition – en partage également – de vélos et de trottinettes.
La prise de conscience constatée par OpinionWay est motivée par différents intérêts, à commencer par les bénéfices en termes de notoriété. Le fait de renvoyer une image écoresponsable apparaît en effet comme le principal bénéfice à tirer de cette démarche d’après les sondés (73%). Viennent ensuite l’amélioration de la productivité des salariés (56%), en réduisant leur stress notamment, et la fierté éprouvée par ces mêmes salariés (44%). La conformité avec le cadre réglementaire n’apparaît qu’en 5e position (40%).
A l’inverse, des freins subsistent pour nombre d’entreprises, en interne. Sans grande surprise, la résistance au changement est le principal obstacle : 57% des sondés évoquent la réticence des salariés à changer leurs habitudes. Mais le manque d’infrastructures serait également responsable (51%), et dans une moindre mesure le manque de ressources humaines pour gérer ce dossier (39%), ou le manque d’installations au sein de l’entreprise (31%). « Qui dit changement dit frein », résume Mélaine Pouchain (Métro). Quant au coût qu’implique une telle évolution, son évaluation demeure mitigée. En effet, 48% des sondés estiment que la mise en place de l’écomobilité n’est plutôt pas cher (41%) voire pas cher du tout (7%).

L’analyse du rapport à l’écomobilité ne peut évidemment pas être déconnectée du contexte inédit traversé depuis plus d’un an. Pour Jérôme Fouque, l’impact de la crise sanitaire s’est avéré « globalement positif » : « En ce qui concerne le nombre de répondants qui étaient sûrs d’intégrer une réflexion sur l’écomobilité en septembre 2020, on était à 20%. Nous sommes maintenant à 42%. Les réticents ou les dubitatifs ont globalement été réduits par trois. On voit donc bien qu’il y a une bascule ».
Le facteur télétravail n’est pas étranger à cette évolution. L’avènement du travail à distance a changé la donne, le regard porté sur les déplacements domicile-bureau, et plus généralement sur l’incarnation du lieu de travail. « Dans les régions très urbanisées, les grands pôles urbains, les temps de trajet sont évidemment une problématique lourde pour les collaborateurs, c’est donc forcément un thème en train de poindre, d’être mis en avant par les organisations syndicales, au travers de la sécurité, de l’équilibre vie privée vie professionnelle, mais aussi au travers de l’efficacité », souligne Emmanuel Guédon (Animis). « Ce qui va transformer les choses, c’est que les managers se rendent compte que finalement les collaborateurs en situation de télétravail sont au moins aussi performants, voire plus que quand ils sont au bureau. Les arbitrages qu’il y aura à faire demain entre la visioconférence ou les réunions en présentiel seront intéressants. Et au travers de ces questions, va se mettre en place une réflexion autour des temps de trajet, des mobilités ».
le code du travail adore la badgeuse
Pour Emmanuel Guédon, l’évolution à plus ou moins long terme pourrait d’ailleurs être plus profonde : « j’ai du mal à imaginer que le code du travail ne repense pas son rapport au temps de travail : le code du travail adore la badgeuse, les éléments incontestables. Le télétravail pose un sérieux problème à ce niveau-là. Il va y avoir une confrontation entre ce que souhaite le code du travail et ces nouvelles organisations, beaucoup plus souples, plus flexibles, avec le lieu de domicile comme lieu de travail, le nomadisme, le coworking, tous ces espaces qui explosent un lieu de travail auparavant pensé comme unique ». Mélaine Pouchain prévient pour sa part : « La mobilité et la non-mobilité constituent un tout, qu’il va falloir travailler dans sa globalité : télétravail, travail à l’extérieur… Des choses vont devoir être mises en place ».

En parallèle du changement de paradigme, de l’évolution des mentalités, quel rôle jouent ou peuvent jouer les nouvelles technologies ? Interrogé sur la place de l’intelligence artificielle dans le chemin vers l’écomobilité, Jérôme Fouque (Corporate Mobilities) pointe « un défaut d’utilisation de la donnée chez pas mal d’acteurs, qui sont assis sur des mines d’or d’informations mais qui n’arrivent pas à les exploiter« . Jérome Fouque préconise donc de « comprendre, à travers des questionnaires assez simples, les usages, les appétences pour des changements de comportement, les freins qui persistent. Plutôt que de faire une communication de masse, avec une possibilité relative d’efficacité, si l’on arrive avec une segmentation beaucoup plus fine des comportements, et pourquoi pas prédictive, on pourra définir des plans d’action peut-être pas individualisé mais qui proposent la bonne solution au bon collaborateur. Il y a une place assez importante, notamment dans la phase de diagnostic ». Chez Metro, Melaine Pouchain confirme que la technologie ne répond pas encore à tous les besoins, que l’outil miracle reste à inventer : « Pour l’instant, il n’existe pas de solution sur le marché qui nous permette d’aider avec simplicité nos collaborateurs à trouver le bon moyen de se déplacer à un moment T, qu’il parte de chez lui, pour un voyage d’affaires, ou depuis le siège vers une autre implantation. Je crois que cet outil n’existe pas encore. Pour l’instant, on fait cela par nous-même ». Charge désormais aux spécialistes du MaaS de trouver la solution ad hoc pour accélérer sur le chemin d’une mobilité intelligente et écoresponsable…