
Comment envisagez-vous l’avenir de l’agence de voyages et l’impact des nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle ?
Christophe Renard – L’agence de voyages d’affaires de demain va évoluer vers une plateforme d’accès au contenu couvrant les différents canaux de réservation. Il s’agira de passer de la « travel management company » (TMC) à la « travel platform ». L’harmonisation entre le online, le offline, le mobile et éventuellement le chatbot ou la messagerie sera cruciale. Il va falloir que tout soit totalement intégré, pour pouvoir passer d’un canal à l’autre tout en gardant l’historique. L’intelligence artificielle (IA) est encore peu présente dans le secteur du voyage d’affaires. Il y a beaucoup de réservations simples qui pourraient être traitées ainsi. Quant aux cas très complexes, comme les situations de changement brutal, d’annulations, il ne faut pas s’attendre à ce que ce soit résolu par l’IA. Les voyageurs ont besoin d’être réconfortés par un agent qui leur parle. L’humain a encore sa place.
Craignez-vous une consolidation du marché, voire l’intrusion de géants du numérique ?
Christophe Renard – Une concentration s’est engagée dans bien d’autres secteurs : il n’y a pas de raison que ce ne soit pas le car pour les TMC. Sur les grands comptes, le marché est déjà relativement concentré autour de trois ou quatre grands acteurs. Aujourd’hui, il serait difficile d’affirmer qu’un seul acteur puisse répondre aux besoins d’une entreprise globale sur tous les marchés. Il reste opportun de s’appuyer sur une solution régionale sur certains marchés pour couvrir tous les besoins, toutes les spécificités. Mais à l’avenir, si l’on se projette dans dix ans, les acteurs de la réservation en ligne auront certainement évolué vers une couverture beaucoup plus globale des besoins, avec des spécificités par marchés, comme la possibilité de traiter le train, le contenu hôtelier… C’est la notion de plateforme dont je parlais. L’intégration avec les éditeurs est aussi un phénomène intéressant, et il y aura très certainement de nouveaux acteurs qui vont entrer sur le marché. Est-ce que Google peut devenir un réel distributeur de voyage ? Cela reste à prouver. Aujourd’hui, cela ne correspond pas vraiment à leur modèle.
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Les enjeux environnementaux vont-ils freiner les déplacements professionnels ?
Christophe Renard – Ce n’est pas encore très palpable, mais ça va le devenir, en particulier avec les nouvelles générations qui vont entrer sur le marché du travail et qui sont particulièrement sensibles à ces enjeux. Y aura-t-il moins de déplacements ? Peut-être un peu. Voyagera-t-on différemment ? Sans doute. Les voyageurs feront plus attention à l’émission carbone de leur trajet. Ce sera une tendance majeure pour les dix prochaines années. Pour le moment, le mouvement va du haut vers le bas : les comités de direction lancent des initiatives comme la mesure du CO2, puis cherchent à responsabiliser chaque collaborateur. Mais le mouvement va bientôt s’inverser, partir des jeunes salariés qui remettront peut-être en question le choix de l’avion et privilégieront des alternatives comme la visioconférence. Pour autant, il y aura toujours un besoin de rencontrer physiquement ses clients, ses collaborateurs ou ses fournisseurs.