Interview : Séverine Lacroix (Europ Assistance)

Pour Séverine Lacroix, directrice Marketing de la ligne métier Voyage d'Europ Assistance France, la prise en charge des voyageurs dans la crise de covid est avant tout un enjeu médical.
(c) Europ Assistance
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Que peut faire un assureur dans ce cas de confinement intempestif en hôpital ou en hôtel ? Séverine Lacroix, directrice Marketing d’Europ Assistance répond.

Comment gérez-vous l’élément Covid-19 ?

Séverine Lacroix – Chez Europ Assistance, on considère le Covid-19 comme une maladie « classique ». Cela signifie que l’on va traiter les cas de contraction de Covid à l’étranger comme on le ferait pour tout autre type de maladie : on va prendre en charge les frais médicaux, d’hospitalisation, un éventuel rapatriement médical. C’est d’ailleurs le principal enjeu de notre métier dans cette crise : la prise en charge médicale à l’étranger, et notamment la prise en charge des cas graves qui nécessitent pour la plupart un rapatriement médicalisé.

Dans le cas d’un voyage d’affaires, normalement l’entreprise assure son salarié pour ce type de risque, et il est important qu’elle s’assure d’avoir souscrit une bonne couverture ! En effet, les conditions pour opérer les rapatriements sont devenues complexes, du fait des réglementations sanitaires ou des fermetures intempestives de frontières, et les conditions pour obtenir des autorisations de rapatriement peuvent parfois être ubuesques. Il est donc recommandé de choisir des prestataires solides, expérimentés et sérieux

Comment, par exemple, évaluez-vous un séjour en hôpital dans un cas de suspicion au Covid?

S. L. – Si le séjour à l’hôpital est dicté par des impératifs médicaux, c’est-à-dire que le voyageur requiert une attention médicale hospitalière, nous le prendrons entièrement en charge, comme expliqué précédemment. En revanche, un séjour à l’hôpital rendu obligatoire en cas de suspicion (c’est-à-dire sans qu’il y ait nécessité de soins médicaux) s’apparente plus à une quarantaine administrative que nous ne pouvons pas couvrir. Il est important d’expliquer qu’aucun assureur ne peut prendre en charge les conséquences des décisions administratives des Etats. C’est un risque dit « de masse » qui n’est pas véritablement assurable.

Quels sont les pays où les conditions de rapatriement sont compliquées ?

S.L. – Le top 5 des pays où les formalités de rapatriement sont difficiles actuellement sont le Maroc et Madagascar en raison de la difficulté d’obtenir des autorisations pour nos vols médicalisés, mais aussi Dubaï, la Tunisie ou Israël qui réclament un test PCR à l’entrée. En cas d’urgence d’intervention pour des personnes gravement atteintes, le test PCR est une source de ralentissement à l’envoi de personnel médical sur place

Dans le cas d’un confinement en hôtel ou d’un séjour prolongé, quelle couverture proposez-vous ?

S. L. – Il faut distinguer plusieurs cas :

– En cas d’isolement obligatoire à l’arrivée dans un pays, nous ne pourrons malheureusement rien faire. En effet, une règle de droit de base dans notre métier d’assureur est celle de l’aléa. Il s’agit de l’article 1964 du code civil conférant un caractère aléatoire au contrat d’assurance. On ne peut donc pas couvrir un risque qui a 100% de chance de se matérialiser, c’est interdit.

– Dans le cas d’un voyage dans un pays X où le risque d’être testé positif conduit à une quarantaine en hôtel, les frais d’hôtel ne seront pas couverts tant que l’on est dans le cadre des dates initiales du voyage. Bien sûr, les frais médicaux le seront, et on peut proposer une consultation avec un médecin à distance et un suivi par nos services. C’est un élément psychologique important pour évacuer le stress.

– En revanche, si une personne contracte le Covid sur place et se trouve obligée de prolonger son séjour, induisant des changements de date de réservation de vols par exemple, cette prolongation est couverte (frais d’hébergement et de changement de vols). C’est aussi valable si la personne, asymptomatique, est testée positive au moment d’aller prendre son avion

Peut-on envisager une évolution de la couverture assurances avec davantage de cas intégrés ?

S. L. – On y travaille ! Mais la Covid évolue vite, la situation sanitaire aussi. On adapte nos couvertures, mais c’est parfois difficile de suivre le rythme : des besoins nouveaux apparaissent puis disparaissent parfois en quelques semaines.

L’une des premières adaptations que nous avons dû mener, en tant qu’assureur, c’est de faire évoluer nos garanties pour couvrir des personnes qui ne sont pas réellement malades, le Covid ayant cette particularité d’être une maladie que les gens peuvent contracter et transmettre sans pour autant avoir de symptômes. Après 2 ans de crise, cela nous parait évident à tous mais ce cas ne s’était jamais produit auparavant.

Ainsi, depuis 2020, nous sommes mobilisés en continu pour nous adapter au fur et à mesure que la crise évolue et que de nouvelles situations apparaissent.

Quels autres services proposez-vous au voyage corporate ?

S. L. – Pour les clients affaires, nous proposons le portail TRIP (Travel Risk Intelligence Portal) qui donne toutes les informations nécessaires pour la planification d’un voyage sur une destination donnée : situation sanitaire, restrictions, réglementations liées au Covid… tout comme des informations plus classiques, liées à la sécurité notamment. Les entreprises l’utilisent beaucoup et TRIP leur permet justement d’accorder ou non une autorisation de voyage vers la destination.