Interview : Ludovic Philippo, directeur de Sabre en France

En début d'année prochaine, Sabre déploiera sa nouvelle plateforme Sabre Red Workspace, une interface de réservation qui s'appuie sur des données prédictives et des outils d’aide à la décision pour affiner la visibilité de l'agent de voyages. Ludovic Philippo, directeur de Sabre en France, fait le point sur les forces de ce nouvel outil, et livre son analyse du marché. Entretien.
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Ludovic Philippo, Directeur de Sabre en France

Quand arrivera la nouvelle plateforme Sabre Red Workspace, et que va-t-elle changer ?

Ludovic Philippo – Sabre Red Workspace sera lancée en début d’année prochaine au niveau global. La plateforme est déjà en test sur quelque 300 agences. Nous mettons à leur disposition tout le travail fourni au cours des dernières années sur les API et les webservices. Il y a eu une énorme évolution dans la façon de faire les requêtes, de faire remonter les informations. Nous avons notamment intégré des API qui permettent aux agents de voir l’évolution des prix, de vérifier le taux d’occupation pour les semaines à venir sur une route précise.

Parvenez-vous à chiffrer les économies engendrées, le temps gagné ?

L. P. – La dernière fois que nous avions fait une démonstration, l’économie atteignait 100 euros sur la destination choisie. L’agent voit tout de suite sur son écran s’il y a un prix plus intéressant à deux ou trois jours, et peut aussi repérer s’il existe un meilleur tarif proposé vers un aéroport alternatif. En un clic, il visualise le calendrier et les variations de prix et dispose ainsi d’un outil de décision qui lui permet de gagner 10 minutes dans la recherche d’un meilleur tarif. C’est crucial. Une étude récente estimait que plus de 40% des réservations ne se font pas au meilleur prix, car les agents ne disposent pas des bons outils pour leur prise de décision.

Le seul frein, c’est le changement

Comment vous situez-vous par rapport à vos concurrents, qui annoncent également des avancées technologiques ?

L. P. – Cela fait déjà trois ans que nous sommes dans le cloud, ce ne sont pas des effets d’annonce. Chez Sabre, nous avons pour habitude d’annoncer des évolutions qui fonctionnent déjà. On est plus dans le réglages, ça fonctionne parfaitement. L’avantage de notre solution se situe aussi par rapport aux évolutions futures comme la NDC, les systèmes de distribution : ces changements sont anticipés. Notre nouvelle plateforme est véritablement en avance sur les webservices, sur l’automatisation de la facturation, sur l’optimisation tarifaire. Tous nos clients progressent en termes de business. Cette plateforme va vraiment révolutionner le déploiement de nos applications. Il n’y a quasiment plus de formation, les modifications sont très rapides. Le seul frein, c’est le changement. Aujourd’hui, le marché français repose sur des technologies vieilles de 20 ans, et certains ne réagissent pas aux changements qu’ils doivent opérer. Quand on arrive avec une technologie de webservices, que l’on peut connecter à tous les sites et les outils online, à la mobilité, tout va très vite en termes de développement pour une TMC. Notre force est là.

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La nouvelle interface Sabre Red Worskpace sera lancée début 2017

Quels sont vos autres dossiers prioritaires ?

L. P. – Nous avons installé pendant l’été chez nos clients une nouvelle plateforme pour les réservations de groupes. Cette solution rencontre un très gros succès. Il y a beaucoup d’événements MICE chez nos clients corporate, et ils sont véritablement satisfaits de pouvoir utiliser cet outil. Plus globalement, tous les efforts que l’on fournit sont portés sur le contenu des webservices, parce que c’est l’avenir pour les agences, qu’il s’agisse d’agences corporate ou non, pour se connecter à n’importe quel type d’outil.

Amadeus investit dans la diversification de son offre, qui dépasse le rôle historique du GDS. Qu’en est-il chez Sabre ?

L. P. – Nous avons la même approche, nous sommes présents d’un bout à l’autre de la chaîne. Nos concurrents ne sont pas en avance dans l’utilisation de leurs technologies pour rendre le business des agences plus efficaces, qu’il s’agisse d’automatisation, d’optimisation tarifaire, de remontée des meilleurs tarifs. Ils vivent sur leurs acquis. C’est une catastrophe pour certaines agences en France.

Ambitionnez-vous de rattraper vos concurrents en termes de parts de marché en France ?

L. P. – Cela arrivera un jour, mais nous n’en sommes pas là. Quoi qu’il en soit, le retard se comble très rapidement, Sabre marche très bien en France. Pour l’instant, nous valorisons ce que l’on a fait et bien fait. De là à savoir comment le business va évoluer d’ici quatre ou cinq ans, c’est très compliqué…

L’agence de voyages a une valeur ajoutée, à nous de lui fournir les bons outils.

Les acteurs historiques ne sont-ils pas menacés par la vente directe prônée par certains fournisseurs ?

L. P. – Les fournisseurs vendent déjà en direct, et ils continueront à le faire. Mais ils ne peuvent pas se couper des réseaux de distribution du jour au lendemain, ou se décréter plateforme de distribution avec une fiabilité irréprochable. La distribution directe coûte cher aux compagnies aériennes.

Le rôle de l’agence de voyages n’est donc pas condamné ?

L. P. – Je ne pense pas. L’agence de voyages a une valeur ajoutée, à nous de lui fournir les bons outils. Les agences doivent faire face à un enjeu majeur : faire évoluer leur technologie. La technologie de Sabre peut leur permettre de faire évoluer leur business model, leur faire passer un cap. Depuis deux ou trois ans, nous avons vraiment accéléré de manière incroyable en termes de qualité produit, d’automatisation. La technologie a fait un véritable bond en avant, que je n’ai pas constaté chez les TMC et les agences en général.