
Comment est né le projet Havas Voyages Connect ?
Michel Dinh – Cette nouvelle solution est la résultante de toute la réflexion que nous avions sur le voyage d’affaires, qui est le cœur de métier d’Havas Voyages. 60% de notre activité est réalisée avec le business travel, principalement sur les TPE et les PME. Les budgets voyages que nous traitons vont de 50000 à 5 millions d’euros. C’est donc un scope assez large.
En quoi ce projet est-il lié à votre cession par CWT ?
M. D. – Notre projet de transformation de la distribution date de 2012. Nous l’avions présenté à Carlson Wagonlits Travel (CWT), notre ancien actionnaire, qui l’a trouvé plein de bon sens. Mais comme nous ne représentions que 3% de l’activité de CWT au niveau mondial, et qu’eux aussi avait abordé une phase de transition digitale très profonde, il n’ont pas souhaité financer ce projet. Nous avons donc fait appel à un financement externe, à travers l’opération de cession qui a eu lieu au 31 décembre 2015 et qui a abouti au rachat par Marietton Développement.
En quoi consistait ce plan stratégique ?
M. D. – Il s’agissait de mettre en place une transformation complète du réseau, à la fois physique et technologique, en s’appuyant sur quatre grands piliers : l’humain, qui est le socle de cette transformation puisque nous avions fait le choix de préserver notre réseau physique pour les PME comme pour les particuliers ; la technologie, car la qualité de nos hommes n’avait pas de sens sans ce volet, à la fois pour les particuliers et les entreprises ; le marketing ; et enfin la transformation du réseau, qui est un point de contact important pour nos clients existants, mais aussi pour le recrutement de nouveaux comptes TPE et PME. Chaque année, nous recrutons en moyenne plus de 30% des acquisitions annuelles d’Havas via notre réseau, et non par notre force commerciale “classique”. Cela crédibilise cette notion de proximité. Les petites entreprises ont souvent un ancrage local très fort, et même si la marque est très reconnue, la relation locale est l’un des arguments de choix. Nous ne sommes pas les seuls à avoir eu cette réflexion : le monde de la banque de détail arrive aux mêmes conclusions et commence à aborder le marché de la même façon.
penser la solution d’aujourd’hui mais surtout celle de demain
En quoi est-ce une rupture ?
M. D. – Nous sommes allés à l’inverse de ce qui a été fait jusqu’à aujourd’hui. La réflexion que nous avons nourri avec nos clients, nos fournisseurs, nos utilisateurs en interne ou en externe s’est attachée à penser la solution d’aujourd’hui mais surtout celle de demain. Il s’agit de mieux coller à des usages clients qui se modifient en profondeur, de prendre en compte la porosité de plus en plus évidente entre les univers du BtoB et du BtoC. Un client ne comprend pas qu’on lui complique l’accès à du contenu via des outils professionnels trop complexe. C’est la raison pour laquelle nous nous sommes tournés vers un fournisseur de solutions qui adopte le rythme d’évolution des comportements, en l’occurrence les équipes d’iAlbatros. Il s’agit d’aller plus loin dans l’agilité, dans la souplesse, mais aussi dans l’adaptabilité permanente. La seule conviction que nous avons, c’est que les choses vont continuer à évoluer, à travers des cycles d’innovation de plus en plus court. Et la structure de notre projet a pris en compte cet aspect pour être en mesure de faire évoluer l’offre. Notre obsession, c’est l’usage client. Il nous fallait un partenaire idoine pour répondre à ce défi. Nous l’avons trouvé et nous nous sommes tous mis en mode start up pour construire ensemble la solution Havas Voyages Connect.
Concrètement, quand est-ce que ce nouveau SBT arrivera chez vos clients ?
M. D. – Ce n’est pas un SBT, il s’agit d’un véritable outil de relation client qui simplifie la vie. Les premières implémentations de cette solution auront lieu le 15 décembre, et le processus s’étalera ensuite jusqu’au 15 janvier à travers plusieurs vagues de migration. L’accueil est déjà très positif chez les clients auxquels nous l’avons déjà montré.

Le besoin de souplesse que vous évoquiez est-il d’autant plus impérieux que votre clientèle est majoritairement composé de PME ?
M. D. – Oui, effectivement. Il y a de vraies nuances entre les grands comptes et les PME-PMI, dans lesquelles c’est souvent celui qui décide qui voyage. Les dirigeants sont donc encore plus sensibles à ce problème de simplicité, car ils sont eux-mêmes décideurs et utilisateurs.
Que représentent aujourd’hui ce marché des PME dans votre clientèle et dans votre plan stratégique ?
M. D. – Les TPE-PME constituent notre marché cible. On compte aujourd’hui en France 3 100 000 PME. 676 000 d’entre elles voyagent, mais seulement 10% d’entre elles sont intermédiées, donc moins de 70 000 petites entreprises. Notre enjeu, c’est donc bien sûr de satisfaire le marché actuel, ces 70 000 entreprises qui travaillent déjà avec des agences de voyages, et éviter qu’elles ne se désintermédient alors que c’est la tendance actuelle. Mais la profondeur du potentiel est beaucoup plus importante chez les entreprises desintermédiées. Nous voulons donc aller chercher ces petites structures en leur expliquant qu’avec notre outil, en un seul clic, elles pourront gérer l’ensemble de leur parcours. La fluidité du parcours est cruciale : les entreprises achètent du temps, un gain de productivité. Tout particulièrement dans une PME qui est à flux tendu, qui voyage souvent en « best buy« , et toujours pour un retour sur investissement. Ce monde des PME s’est désintermédié parce qu’on a pas su leur parler comme elles l’attendaient, et leur proposer les outils dont elles avaient besoin.
le business model d’Havas Voyages repose sur deux jambes
Pensez-vous faire évoluer votre équilibre clientèle avec ce nouvel outil, en développant la partie corporate ?
M. D. – Non, le business model d’Havas Voyages repose sur deux jambes : les particuliers et les PME. Il y a une très forte porosité entre les deux marchés. Quand un client PME confie ses voyages d’affaires à l’une de nos agences, la confiance s’établit, et il a tendance à nous confier également ses déplacements à titre personnel. Nous avons donc besoin de ces deux activités complémentaires.
Quel regard portez-vous sur la relation entre voyage d’affaires et loisirs ?
M. D. – On voit bien que la porosité entre business travel et leisure arrive en France. C’est un vrai sujet pour toutes les TMC. Les clients affaires arrivent maintenant avec des applications comme Trainline d’autres outils issus du loisirs. Simplement parce que c’est ultra-simple, et qu’ils ne veulent pas se compliquer la vie ! Le comportement du voyage d’affaires est largement influencé par le monde des applications loisirs… C’est la source d’inspiration, et les voyageurs sont les mêmes.