Hospitalités : le rugby aux premières loges

Pendant les deux prochains mois, ce seront sans nul doute les derniers salons où l’on cause. De business un peu, mais surtout de rugby. Cadrage-débordement, chistera ou mêlée écroulée : dans les loges et espaces hospitalités des neuf stades hôtes de la coupe du monde, le langage managérial va se mettre à l’ovale. Près de 25 000 entreprises et décideurs s’apprêtent en effet à choyer leurs clients et collaborateurs en leur offrant le meilleur du rugby.

Avec 280 000 prestations Hospitalités proposées autour des 48 matchs, l’organisateur de la compétition, France 2023, compte sur cet engouement pour rentabiliser l’événement, ce poste représentant à peu près un tiers des revenus. Derrière la billetterie, mais devant le sponsoring. Des sponsors qui seront naturellement aux premières loges pour accueillir leurs invités dans des conditions VIP, avec dîner assis, place de choix et rencontres avec d’anciennes stars du ballon ovale.

Avec des opérations de relations publiques prévues autour de 24 matchs, Société Générale va accueillir 7500 clients pendant l’événement, accompagnés par un collaborateur du groupe pour approfondir les relations à travers ces moments d’émotion partagés. Des invitations qui concerneront tous les stades, la coupe du monde étant une bonne occasion de célébrer la récente fusion des réseaux Crédit du Nord et de la banque de détail Société Générale pour créer la nouvelle marque nationale SG. « Il était important pour nous d’être présents et de pouvoir inviter nos clients dans toutes les régions. La Coupe du monde est une formidable plateforme pour lancer cette nouvelle marque, fédérer les clients Crédit du Nord et Société Générale, et leur faire vivre une expérience SG sur l’ensemble des stades », explique Katia Lazarew, responsable du sponsoring sportif du groupe Société Générale (voir interview par ailleurs).

Avec des partenaires majeurs comme cette grande banque française mais aussi CapGemini, Defender (Land Rover), Emirates et Mastercard, avec une flopée d’entreprises françaises en tant que sponsors officiels allant d’Accor à Vivendi en passant par GL Events, GMF, SNCF, Orange ou Total, l’événement a mobilisé le monde économique français. Jusqu’au réseau France Pare-Brise, lui aussi impliqué dans l’événement.

Le rugby n’est donc pas qu’une affaire de grands comptes. Parmi ses clients, l’agence événementielle Derby, un des deux revendeurs officiels des prestations hospitalités au Stade de France, compte peu d’acteurs du CAC 40, mais surtout « de très belles ETI et PME« , explique Didier Tibaut, fondateur de l’agence. Notamment Chronopost, Fenwick, Paprec, Normandie Manutention ou encore la fédération française du bâtiment et la filiale française de Fred Perry. « Un de nos très bons clients pour les séminaires, DAT-Schaub, une entreprise danoise numéro 1 de la boyauterie en Europe, a lui aussi cassé sa tirelire en invitant plusieurs clients à chaque match au Stade de France. De quoi marquer les esprits face à la concurrence », présente-t-il également.

Cette offre d’hospitalités qui a un coût certain – 2000 euros en moyenne pour la prestation Webb Ellis, au sein d’un salon VIP privatif de 300 personnes à côté de la présidentielle -, mais qui garantit de vivre pleinement l’événement de 18h à minuit. Avec la présence de joueurs internationaux, le All Black Victor Vito et des joueurs français comme François Trinh Dhuc, Philippe Bernat Salles ou Christophe Lamaison. « C’est notre forte plus-value, décrit le dirigeant de l’agence Derby. Ils dînent à table, interviennent avant le match, le débriefent à la fin« .

Partenaire de France 2023 au Stade de France, l’agence avait également la possibilité de vendre ses offres pour les matchs en province. « Des clients qui ont réservé des prestations à Paris ont aussi voulu faire plaisir à leurs directions régionales à Bordeaux, Lille, Lyon ou Marseille », remarque Didier Tibaut. Car, le rugby étant un grand sport régional, à forte connotation Sud-Ouest, la portée de l’événement s’ouvre largement au niveau national, jusqu’à séduire le tissu économique autour des villes hôtes.

Ancien cadre de grandes multinationales telles IBM et HP, Philippe Sarlin a lancé, une fois à la retraite, sa propre société spécialisée dans la transformation numérique, DigiPhit, basée à Grenoble. Avec pour clients des PME de la région Rhône-Alpes, ce grand amateur de rugby a choisi d’en inviter certains à Lyon. « C’est une très belle offre hospitalité que propose France 2023, qui n’est pas donnée évidemment, mais vendue à un bon prix. J’ai sélectionné un package de trois matchs avec quatre places à chaque fois« , précise Philippe Sarlin. Avec, pour le guider dans la distribution de ces sésames, la passion du rugby. « J’invite un client qui connaît très bien ce sport pour un match à enjeu, Pays de Galles-Australie, puis un amateur de rugby d’origine italienne lors de Nouvelle Zélande-Italie et enfin un client moins féru de ballon ovale à Nouvelle Zélande-Uruguay, pour lui faire découvrir l’ambiance et la magie des All Blacks« , recense-t-il.

Cohésion, humilité, solidarité : les valeurs du rugby collent au discours que tient Philippe Sarlin en accompagnant la conduite du changement chez ses clients. « Les aspects humains sont prépondérants dans tout projet high tech, explique-t-il. C’est comme la coupe du monde, c’est un projet d’équipe avec un coach, des objectifs. Les gens doivent se serrer les coudes et y croire ». En offrant ces moments de sport et de partage à ses meilleurs clients, il entend dès lors asseoir la cohérence de ses interventions et donner de la visibilité à son entreprise. Si Philippe Sarlin n’a pas réservé de match à Paris, son agenda est laissé libre pour les derniers week-ends d’octobre, on se sait jamais. « En 2007, au dernier moment, on m’avait proposé une place pour la finale« …