Motivation : la gastronomie pour valeur sûre

Des coffrets cadeaux et des dîners gastronomiques, des découvertes  oeunologiques et des cours de cuisine, une multitude d'épreuves épicuriennes : les récompenses gourmandes restent une valeur sûre !

 « Les cours de cuisine en petit comité sont de plus en plus demandés », constate Rogier van den Biggelaar, le chef du restaurant Le Ciel d’Or au Relais Royal  à Mirepoix, dans l’Ariège. Niché en plein coeur du pays cathare, cet établissement reçoit régulièrement des petits groupes d’hommes d’affaires, pour la plupart issus du secteur aéronautique, proximité de  Toulouse oblige. Ces cadres sont tout autant séduits par la beauté de cette demeure Grand siècle que par la cuisine gastronomique préparée par le chef hollandais. Avec son franc parlé, son ardeur à défendre les producteurs locaux et son léger accent trahissant ses origines, Rogier van den Biggelar charme ses clients. Et, surtout, il leur transmet sa passion. Par groupes de huit personnes, il les accueille dans sa cuisine, les emmène faire le marché, choisissant avec eux les ingrédients qui serviront à préparer les plats à venir.

Travail d’équipe

En accueillant dans leurs cuisines des cadres d'entre-prises triés sur le volet, les chefs étoilés transmettent autant leur savoir-faire que leur passion des bonnes choses.« La cuisine est une activité très intéressante pour une entreprise, explique Rogier Van Biggelar. Les personnalités se dévoilent rapidement ! Chacun doit trouver sa place et accomplir le mieux possible sa tâche. Tout le travail de l’équipe repose de fait sur la bonne volonté et, éventuellement, le talent de chacun. Les participants élaborent un menu complet, de l’entrée au dessert, confectionnent les plats, résolvent les problèmes rencontrés pour, au final, présenter dans un temps imparti un ensemble cohérent. Et bon ! » La dégustation finale est l’occasion d’échanges renforçant l’esprit d’équipe tout en forgeant des souvenirs agréables. Au-delà de réveiller l’épicurien qui sommeille en tout un chacun, cuisiner implique un vrai processus émotionnel : peur de rater le plat ou d’être jugé, crainte de ne pas faire aussi bien que le chef – la mère, psychologiquement – ou tout simplement que les autres n’aiment pas ce qu’on leur présente… Le parallèle avec la vie en entreprise est là, présent. Car vaincre ces peurs, c’est aussi savoir gommer les obstacles professionnels ou du moins aider à les franchir pour s’épanouir en équipe.

Après avoir fait son marché en compagnie de petits groupes exclusifs, Rogier van den Biggelaar, chef au Relais Royal, dévoile ses secrets de cuisine.En fonction des objectifs de l’entreprise, les cours peuvent également se transformer en de véritables compétitions. Au Labo culinaire, les groupes d’une vingtaine de participants s’affrontent pendant deux heures, encadrés par un maître japonais. Leur but : composer les meilleurs et les plus beaux sushis à partir d’un panier qu’on leur remet. La créativité et l’esprit d’équipe font office de fil rouge afin de remporter le sushi d’or ! « De nombreux défis peuvent être proposés autour de ce produit », précise Yassine Khelifi, cofondateur de l’agence. D’autant que cette spécialité japonaise illustre par l’exemple la complémentarité de chacun au sein d’une entreprise. L’analogie est subtile, puisque dans le cas du sushi, il faut savoir utiliser une mince feuille d’algue pour faire cohabiter harmonieusement riz et poisson sans rien renier de leur individualité et de leurs propriétés gustatives.

Ces challenges gourmands sont l’occasion pour chacun de s’affirmer au sein du groupe et de montrer sa valeur. Chez Corpo’Events, le parallèle avec la vie professionnelle se fait au travers de casinos gourmands et de chasses au trésor pédestres. « Pour cette dernière activité, nous mettons en avant les spécialités locales. Par exemple, à Paris, nous organisons dans le quartier du Marais des rallyes thématiques sur les macarons et à Marseille sur des pâtisseries locales, les navettes marseillaises. À Lyon le thème porte sur le vin, le fromage et la charcuterie », précise Élodie Larroque, directrice. Ces découvertes épicuriennes sont associées à la rencontre des artisans des métiers de bouche. Des professionnels qui, pour la plupart, aiment à faire partager leur amour du métier. Un autre message fort pour une entreprise.

L'engouement autour des émissions de téléréalité Top Chef ou Master Chef a donné des idées aux agences incentive qui proposent des team-buildings associant créations culinaires et esprit d'équipe.Faciles à organiser et ne nécessitant pas un budget mirobolant, ce type de team-building connaît un franc succès. Mais ce n’est pas la seule raison pour expliquer qu’aujourd’hui les cours de cuisine sont particulièrement en vogue. Boostés par les émissions de téléréalité culinaire – Un dîner presque parfait, Le meilleur pâtissier, Cauchemar en cuisine, Top Chef, MasterChef, Le défi – les ateliers de cuisine sont pléthore. Ainsi, au printemps dernier, l’office de tourisme de Saint-Emilion a lancé une offre spéciale entreprises, leur proposant un atelier cuisine dans un château producteur de grands crus. Sous la houlette d’un chef cuisinier, les participants confectionnent un repas à base de spécialités régionales, participent au dressage de la table et visitent la propriété, leur offrant ainsi l’opportunité de découvrir les grands crus locaux.

Membre de Symboles de France, le château de Gilly, en Bourgogne, organise des séminaires ponctués de dégustations avec le sommelier. Car la France, terre rabelaisienne, est aussi le premier pays producteur viticole au monde. Plus de 5 000 caves sont ouvertes à la dégustation et l’oenotourisme est en pleine expansion. Les entreprises n’ont que l’embarras du choix : ateliers vins, dîners gastronomiques, survol des domaines en hélicoptère, participation aux vendanges avec pause casse-croûte vigneron, initiation à la dégustation, découverte de l’art de vivre à la Française, vinothérapie au coeur d’un vignoble de renom, animation par une confrérie… « Les clients recherchent avant tout une authenticité et un accueil personnalisé », constate Florent Bénétreau, directeur associé de la chaîne d’hôtels Symboles de France. Ainsi au château Bellevue, dans le Gers, Charlotte, chef des cuisines, emmène sur demande les petits groupes chez les producteurs de la région. Ils rencontrent alors Amélie la fromagère, M. Barrouillet l’éleveur de pigeonneaux, Thérèse la maraîchère ou encore Valérie l’éleveuse d’escargots… Quant au château de Chargé, à Chinon, les entreprises comme LVMH, Total ou Saint-Gobain aiment y séjourner, non seulement pour le cadre et le restaurant gastronomique, mais également pour les balades en calèche dans les vignes, les repas pris dans une cave à vins et les dégustations de crus locaux.

Dîners au fil de l’eau

Les croisiéristes et les compagnies maritimes suivent cette voie en organisant des croisières gourmandes. Ainsi, 
à bord des trois voiliers de Star Clippers, les passagers peuvent goûter à la cuisine de grands chefs, découvrir des vins sélectionnés par des sommeliers réputés, assister à des démonstrations culinaires. Sur la Seine aussi, les entreprises peuvent offrir des repas gastronomiques ou organiser des ateliers oenologiques, en particulier sur le Don Juan II ou le Cachemire, les deux luxueux bateaux des Yachts de Paris. Le soir, des dîners concoctés par le chef Guy Krenzer, double meilleur ouvrier de France, et accompagnés de vins choisis par Olivier Poussier, meilleur sommelier au monde en 2000, marquent les esprits des convives. Même ambiance à bord du Diamant et du Cristal, les deux fleurons des Bateaux Parisiens avec en prime pour le premier, une vue exceptionnelle sur Paris.

 Autre tendance forte : la demande exponentielle pour des coffrets à vocation gastronomique dans le cadre des cadeaux d’affaires ; un type d’attention qui plaît à tous, sans différenciation d’âge, de sexe  ou de catégorie socio-professionnelle. « Pour stimuler, parrainer, fidéliser les coffrets cadeaux sont très efficaces », confirme Sandrine Cotten, coordinatrice générale du Syprocaf, syndicat des producteurs des cadeaux d’affaires et des objets publicitaires.

Pour répondre à ce marché, bon nombre de prestataires ont lancé leurs propres produits. Ainsi Symboles de France édite toute une gamme d’offres qui donne au bénéficiaire la possibilité de choisir un séjour parmi les 75 établissements membres de la chaîne hôtelière. C’est aussi le cas du château de Berne, dans le Var. En parallèle de ses cours de cuisine et de ses découvertes oenologiques ou de ses soins à base de raisins prodigués dans son luxueux spa, l’établissement, membre des Relais & Châteaux, présente des coffrets cadeaux contenant une ou trois bouteilles de vins élevés au domaine.

En 2012, le marché français des coffrets gourmands a dépassé les 300 millions d’euros. Par rapport aux articles grand public, leur présentation est plus soignée et les prestations plus recherchées. En effet, l’entreprise n’a pas droit à l’erreur : un cadeau décevant donne une image négative, allant à l’inverse de l’effet escompté. Surtout lorsqu’il s’agit d’une stimulation commerciale ! Fabien Martre, directeur général d’Ideal Gourmet, l’un des précurseurs en matière d’invitations gastronomiques, observe que « les coffrets cadeaux restaurant cartonnent. Les produits bio et provençaux connaissent aussi un franc succès. » L’entreprise est certaine de faire plaisir en offrant un dîner, a fortiori s’il s’agit d’un repas dans un établissement de renom. Le coffret Haute gastronomie d’Idéal Gourmet invite ainsi à un dîner pour deux personnes à choisir parmi une quarantaine de tables, dont de nombreuses étoilées.

Des dîners étoilés, des paniers remplis de produits du terroir ou, plus iconoclaste, un iPhone en chocolat : les entreprises ont l'embarras du choix pour des cadeaux à tonalités gourmandes.Relais & Châteaux joue également la carte de l’exception avec sa collection Création  : 14 coffrets cadeaux numérotés, allant de 169 € à 1 220 €, répertorient près de 2 800 expériences à vivre dans un des 350 établissements répartis dans le monde entier. Le coffret se présente sous la forme d’un écrin à bijoux blanc, assorti d’un ruban de couleur et composé pour certains de trois compartiments. Le premier cache un carnet d’inspirations et un crayon à papier invitant à écrire ses souvenirs de séjour. Le second contient un livret photos présentant l’univers Relais & Châteaux. Et le troisième renferme l’invitation sous forme d’une carte cadeaux. « Nous avons souhaité un packaging innovant et haut de gamme mettant en valeur l’art d’offrir », explique Thomas Jobbé-Duval, directeur marketing et développement produits.

Des coffrets trois étoiles

Les coffrets gourmands ont la cote pour des cadeaux d'entreprises de fin d'année prestigieux et raffinés. La collection Création de Relais & Châteaux propose un large choix de séjours gastronomiques dans 350 établissements en France comme ailleurs. Ici le Vineyard à Stockcross, au Royaume-Uni. Les coffrets les plus onéreux sont ceux où l’accent est mis sur la haute cuisine. Par exemple, le plus cher, « Création 29 : Passions partagées » regroupe des séjours en suite avec dîner – cinq plats et boissons comprises –, petits déjeuners et activités gastronomiques et oeunologiques. Parmi les prestations proposées, on trouve des cours de cuisine prodigués dans une quinzaine d’établissements labellisés, dont Flocons de Sel à Megève, trois étoiles au Michelin. Les groupes, 10 personnes au maximum, passent ainsi la matinée en cuisine avec le chef Emmanuel Renaut afin de découvrir les coulisses d’un des meilleurs restaurants du monde. Autres exemples : l’Hostellerie de Plaisance, à Saint-Emilion, deux macarons au Michelin, qui propose aux invités une initiation privée à la dégustation à l’École du vin suivie par une visite du château ou l’hôtel Ombremont au Bourget-du-Lac, en Savoie, où les cours de cuisine sont dispensés par le chef Jean-Pierre Jacob, deux étoiles au Michelin. « La clientèle affaires représente près de 15 % de nos séjours et 65 % de nos ventes de coffrets cadeaux. Avec la gamme Création, nous ambitionnons d’augmenter globalement nos ventes d’environ 18 % et de 10 % pour le B to B », poursuit Thomas Jobbé-Duval.

Christine Charoff, fondatrice de l’agence COM’un Chef, croit aussi à ce marché porteur. « C’est extrêmement fédérateur. Classée au patrimoine immatériel de l’Unesco, le repas gastronomique à la Française célèbre les moments les plus importants de la vie des personnes ou d’un groupe. En période de crise, les sociétés misent sur des valeurs sûres et salutaires. La bonne chère en fait partie ! » Spécialisée dans les cadeaux d’affaires et les événements d’entreprise, COM’un Chef propose des cadeaux gourmands via La Clé des Chefs, sa boutique en ligne. Le bénéficiaire choisit lui-même son présent en fonction de la clé qu’il a reçu. Les récompenses vont d’un dîner dans un établissement de renom à des cours de cuisine, d’ateliers à des séances de coaching, en passant par des coffrets et des activités de team building.

Délices liberty

Une aventure culinaire sur les mers du monde : le croisiériste Star Clippers porte, lui aussi, toute son attention sur son offre gastronomique. « Tout ce qui touche à la gastronomie est demandé », renchérit Yolande Large, directrice de Liberty & Co, anciennement la Compagnie des cadeaux. La croissance exponentielle de la demande a conduit cette société à lancer « Délices Liberty », une collection composée uniquement de produits haut de gamme : champagne noté 15/20 par le guide des vins Gault & Millau, foie gras médaille d’argent, gourmandises Hédiard, flûtes Villeroy & Boch… La gamme gourmande s’échelonne de 35,90 € à 99,99 € afin de correspondre à tous les budgets. Certains coffrets sont également associés à la carte Liberty, qui offre la possibilité au bénéficiaire de choisir en supplément un cadeau de son choix parmi plus de 200 propositions.

Parallèlement, les artisans se sont eux aussi adaptés aux demandes de la clientèle affaires. En épicerie fine, des maisons comme Hédiard, Fauchon, Ladurée ou Dalloyau sortent chaque année un catalogue spécial B to B. Ainsi la collection 2013-2014 de Fauchon propose des « Petites attentions » à partir de 10 € et va jusqu’à des « Coups de folie » à 510 €. L’artisan chocolatier Jadis & Gourmande joue pour sa part sur l’innovation et la créativité. Ayant mis au point une technique d’impression sur chocolat, il peut reproduire n’importe quel message cacaoté et réaliser toutes les couleurs et formes voulues : CD, carte de voeux, flashcode, médailles, bouteilles, portables, plaques gravées, stylos, alphabet, emballage… « Auparavant, les entreprises sensibilisaient leurs clients grâce à des coffrets de chocolats. Aujourd’hui, le cadeau est plus un clin d’oeil, une piqûre de rappel, une petite attention… Souvent offerts en fin d’année, les chocolats sont de plus en plus envoyés à l’occasion d’autres fêtes comme Pâques », souligne Istvan d’Eliassy, directeur.

Travaillant sur mesure, la société répond à la demande, depuis le briefing jusqu’à la conception du produit et, bien sûr, à sa livraison. Douze collections sont présentées chaque année avec chacune au moins trois produits entièrement nouveaux. Tout comme la qualité et l’originalité, la nouveauté est primordiale pour fidéliser la clientèle B to B et séduire de nouveaux prospects. Très exigeante et extrêmement sollicitée, elle demande autant d’attention que la préparation d’un bon repas ou l’assemblage d’un grand cru !