
L’étude intitulée « Fierce Competitors, Fragile Foes » (« Concurrents acharnés, ennemis fragiles »), s’appuie sur une étude de Frontier Economics publiée plus tôt cette année, qui analyse les développements récents et futurs de l’industrie du transport aérien en Europe. Ces deux études examinent le fonctionnement et l’évolution de la concurrence entre les aéroports, qui s’exerce désormais fortement au niveau paneuropéen.
La balance est de fait très déséquilibrée : d’un côté près de 700 aéroports, de l’autre 5 grands groupes de compagnies aériennes européennes. Selon l’ACI les aéroports se livrent ainsi à une vraie bataille pour capter l’intérêt de ces compagnies aériennes. Cela, afin d’attirer lignes aériennes et, éventuellement, une base d’avions.
Le Covid a exacerbé la concentration de l’offre aérienne
L’ACI Europe constate que le déséquilibre s’est encore accentué avec la pandémie de Covid 19. Et qu’il profite aux compagnies aériennes. Trois facteurs dérivent de la sortie de crise : une expansion incessante des transporteurs à très bas coûts qui sont désormais majoritaires sur de très nombreux aéroports ; la consolidation accélérée pour les autres compagnies aériennes et une gestion très restrictive des capacités des compagnies aériennes.
Toujours selon le rapport de l’ACI, les 5 plus grands groupes aériens en Europe (Air France-KLM, easyJet, IAG, Lufthansa Group et Ryanair) représentent 60% de tous les vols intra-européens. Tandis que les 5 premiers transporteurs du continent ont une part de marché qui flirte avec les 39% en 2022. Cette part de marché était de 34,7% en 2019…
Sur de nombreuses plateformes aéroportuaires, on constate une instabilité des réseaux proposés. Les lignes et destinations fluctuent constamment, quelquefois même de trimestre en trimestre. Le nombre constant d’ouvertures et de fermetures de lignes ainsi que les changements de capacité sur les liaisons existantes, prouvent que les aéroports sont soumis à une pression concurrentielle constante pour rester attractifs face aux compagnies aériennes, souligne l’ACI Europe.
Selon les statistiques de l’étude, 55% de toutes les lignes aériennes expérimentent des fluctuations de capacité de plus de 10% sur une année. Et ce, à la hausse comme à la baisse.
« Un concours de beauté »
S’exprimant durant la conférence Routes Europe à Lodz (Pologne), le directeur général de l’ACI Europe, Olivier Jankovec, analysait : « Routes Europe repose sur le concept de connectivité aérienne, vitale pour nos pays, nos régions, nos économies et nos sociétés. L’événement Routes est essentiellement un concours de beauté : les aéroports rivalisent pour attirer les compagnies aériennes. Celles-ci [en retour] peuvent et veulent exercer un pouvoir de négociation grâce à leur taille et à leur flexibilité« , expliquait-il.
L’ACI Europe estime donc que les compagnies aériennes ont désormais toute latitude pour fixer prix et capacités. Malheureusement au détriment des consommateurs. Et que si la concurrence entre aéroports existe, elle ne bénéficie guère du soutien des régulateurs européens.
Aucun levier pour les aéroports ?
« Le résultat est que les aéroports sont sur-réglementés, avec des prix plafonnés et une liberté commerciale limitée. Pendant ce temps, les compagnies aériennes jouissent d’un pouvoir de tarification illimité vis-à-vis des consommateurs, sans aucun contrôle. Ces régimes ne visent qu’à protéger les compagnies aériennes et leurs actionnaires. Et ne font pas grand-chose pour protéger les consommateurs. Il faut que cela change« , a martelé Olivier Jankovec.
Si la compétition existe entre aéroports, ces derniers semblent donc de moins en moins être en position de négociation équilibrée avec les compagnies aériennes. C’est notamment le cas sur des aéroports ayant un trafic passagers de moindre importance (sous la barre des dix millions de passagers). Ces aéroports devraient continuer à subir de fortes fluctuations dans l’offre aérienne. Et voir leur trafic passagers croître ou décroître au gré de l’offre…