Robots : l’avenir de l’Homme

Ils ont pour nom Sofie, Hospi, Nadine, Aura, Zoé ou Techi… Ils avancent sur des roulettes, butent parfois contre les portes, mais sont souvent d’une efficacité redoutable : ce sont les robots qui dessinent le futur des hôtels de Singapour tout comme celui de ses habitants.
Robots : l’avenir de l’Homme
Lointains cousins du R2D2 de Star Wars, Techi et Aura sillonnent les couloirs des hôtels Park Avenue et M Social. Cette robotisation accélérée du service hôtelier vise aussi à relever un des défis de l’économie singapourienne : le manque de main-d’œuvre. © Ludovic Maisant

Le premier pays du monde à avoir fait usage d’un robot dans un hôtel n’est pas Singapour, mais le Japon. C’était en 2015. Pourtant, la cité-État n’a pas mis longtemps à lui emboîter le pas. En juin 2016, l’ouverture de l’hôtel M Social a marqué l’introduction d’un butler high-tech baptisé Aura. Ce petit robot, dont le nom signifie Automated Room-Delivery Associate, est capable, malgré ses apparences un peu pataudes, de circuler à travers les étages pour apporter aux clients une bouteille d’eau, une serviette, des produits d’accueil.

À Singapour, l’hôtel du futur, ce sera à peu près ça : les clients feront leur check-in sur Internet, puis, à peine arrivés, un robot leur servira les boissons qu’ils auront précommandées, apportera leurs bagages en chambre et livrera leurs commandes de room service, explique Anne Chong, la directrice marketing & communications des Millennium Hotels and Resorts, le groupe auquel appartient le M Social. Ces robots pourront entrer dans les chambres sans clé, grâce à une application smartphone.

Singapour, ArtScience Museum
L’ArtScience Museum consacrait une exposition sur la place de l’Homme dans le futur

Selon Anne Chong, “le robot ne viendra nullement remplacer l’humain, mais lui apportera un soutien dans l’exercice de son travail quotidien. Ils peuvent porter des charges bien plus lourdes que ne le peuvent les hommes. En revanche, rien ne remplacera un sourire ou une écoute attentive. Ainsi, le robot permet déjà à nos équipes d’être plus disponibles pour nos clients, et donc de mieux anticiper leurs besoins.

Apparemment, les tâches assignées à ces machines étant limitées, peu d’aspects nécessitent encore d’être améliorés. Cependant, les concepteurs de Techi, un autre robot utilisé par l’hôtel Park Avenue Rochester depuis le printemps 2016, sont d’avis qu’il reste certains progrès à accomplir, notamment en matière d’esthétique et de dynamique. Conçu par la start-up Techmetics, Techi mesure 1,38 m et dispose de trois compartiments. Il est déjà capable de s’acquitter du room service et d’apporter en chambre les plats du restaurant de l’hôtel. “Même si notre siège est en Inde, cette technologie est née à Singapour il y a presque quatre ans, explique Mathan Muthupillai, directeur de Techmetics. Sept hôtels de la cité-État en possèdent ou sont en passe d’en acquérir, et nos robots commencent à être commercialisés dans des pays comme l’Australie, Dubaï ou la Thaïlande.

Si les robots sont de plus en plus demandés, ils sont surtout utilisés dans les hôtels quatre étoiles, plus rarement dans des établissements cinq étoiles qui privilégient le face à face individuel avec la clientèle. Même si Robie, un robot dont la tâche se limite en coulisse à distribuer et collecter le linge à travers les étages, pourrait tout à fait trouver sa place dans les plus beaux hôtels de la ville, comme il l’a déjà fait dans plusieurs hôpitaux de Singapour. “Un robot comme Techi ou Robie coûte entre 70 et 80 000 dollars singapouriens (NDLR : autour de 50 000 euros), poursuit Mathan Muthupillai. Mais le gouvernement de Singapour, qui tient à positionner la ville en tant que smart city, propose de gros incentives et rembourse 70 % de l’investissement aux établissements ou aux institutions qui s’équipent actuellement de telles machines.

Ceci explique en partie pourquoi ces associés du futur, garantis deux ans, séduisent de plus en plus les hôteliers. Avant même son ouverture au mois de septembre, le Sofitel Singapore City Centre a fait l’acquisition de quatre robots : deux pour assister les équipes en back office et deux autres, prénommés Sofie, amenés à rencontrer les clients, notamment pendant le réassort des minibars.

Mais c’est aussi vers l’assistance à la personne privée que se tourne la robotique, a fortiori dans une ville dont la population est l’une des plus vieillissantes au monde. Actuellement, l’exposition “HUMAN+: The Future Of Our Species”, au musée ArtScience de Singapour, présente Nadine, une jeune femme à la peau claire, aux cheveux blonds vénitiens, mais aux mains légèrement disproportionnées pour sa silhouette féminine. Nadine use d’un vocabulaire encore quelque peu limité et répète à qui veut bien l’entendre que “vous semblez être une personne joyeuse”. Néanmoins, elle devrait sous peu savoir parler plusieurs langues étrangères, le français notamment.

Nadine - Singapour, ArtScience Museum
Ceci est un robot ! Nadine, aux traits presque humains – et d’ailleurs pleine d’humanité puisque conçue pour aider les personnes âgées – témoigne des frontières floues entre fiction et réalité. © Ludovic Maisant

Dame de compagnie high-tech

Développée par des chercheurs de la Nanyang Technological University de Singapour, Nadine est le prototype du robot “dame de compagnie” qui pourra assister au quotidien les personnes à mobilité réduite, âgées ou handicapées, en leur lisant des histoires, en les aidant à consulter ou écrire leurs emails etc… Quant à Hospi, avec son écran d’ordinateur en guise de minois, il sillonne déjà les couloirs du Changi General Hospital pour apporter médicaments ou autres commodités au sein de l’hôpital.

Pourtant, l’autre robot au prénom le plus humain et dont on parle le plus à Singapour est… Zoé, une voiture conçue par des Français. Ce véhicule électrique a été inventé par Renault, mais les étapes d’expérimentations et d’applications sont supervisées par une start-up singapourienne basée aux États-Unis, NuTonomy. Ce taxi sans chauffeur est à l’essai depuis l’été 2016 sur une zone test de 4 km2 et devrait être accessible au public courant 2018. Pour l’utiliser, les passagers devront le commander via une application smartphone. Un premier pas avant l’introduction prochaine du bus de ville électrique ! Sans chauffeur, bien entendu.