
Un Singapore Sling ou un dry martini au shaker ? Il suffit de demander aux nouveaux bartenders du croisiériste Royal Caribbean, capables de composer cocktail sur cocktail avec leurs bras mécaniques. Sauront-ils pour autant recueillir les confidences de certains clients ?
Des Humanoïdes pour gérer le quotidien
Est-ce un hasard si le premier hôtel au monde géré par des robots a ouvert cet été au pays du Soleil Levant ? Férus de curiosités high tech, les Japonais ont sans doute été moins perturbés que d’autres de retrouver à l’accueil du Henn Na, à Nagasaki, une femme humanoïde, un dinosaure et un petit robot leur donnant des consignes pour faire leur check-in. D’autres robots se chargent ensuite de transporter les bagages et dans les chambres, Chu-ri-Chan, la mascotte de l’hôtel, règle à la demande la température ou programme le réveil. De quoi ravir les enfants venus avec leurs parents dans cet établissement situé au sein du parc d’attractions Huis Ten Bosch. De quoi ravir aussi leurs parents. “Le concept est extra, mais les robots ont encore quelques efforts à faire pour compenser le travail des humains”, commentait un client, Changhong Z, sur Trip Advisor. Parmi les points à améliorer, la gestion des valises hors norme en poids ou en taille, mais aussi quelques désagréments intempestifs… “Le robot à coté du lit a crié en plein milieu de la nuit, cela m’a bien surpris…”, note ce même client.
Surprise : A.L.O est à la porte
Si tout est encore loin d’être parfait, les robots font une entrée remarquée dans les industries de services. Ainsi, il y a un peu plus d’un an, les clients du Aloft Cupertino ont eu la surprise, en faisant appel au room service, de voir apparaître à leur porte A.l.o, un robot de trois pieds de haut qui n’est pas sans rappeler le R2D2 des épisodes de Star Wars. Si l’enseigne jeune et trendy du groupe Starwood a choisi Cupertino pour lancer ce service de butler futuriste – ou plutôt “Botlr” pour le dire de manière plus high tech – ce n’est pas, là non plus, le fruit du hasard. L’établissement se trouve à deux pas du siège d’Apple et sa clientèle est naturellement technophile.
Elle s’est d’ailleurs rapidement prise au jeu à en croire les commentaires, là aussi postés sur Tripadvisor. “Oh, ils ont un robot pour le service en chambre. C’est vraiment cool, ça !”, s’est réjoui Mary R., de Phoenix. “Mes enfants ont adoré passer leurs commandes au Botlr. Ils ont été tristes au moment de lui dire au revoir”, raconte pour sa part SC, de San Jose.
La carte de l’hôtel en mémoire, ce robot est capable de circuler de manière autonome des heures durant dans les couloirs, un peu à la manière de ces nouveaux aspirateurs qui font le ménage tout seul. Grâce à une connexion WiFi, il sait aussi appeler l’ascenseur pour monter dans les étages. Et, s’il n’a pas de bras pour frapper à la porte, il lui suffit d’appeler sur le téléphone de la chambre pour signaler sa présence. Bien élevé, le robot est également programmé pour respecter une certaine étiquette, afin de ne pas bloquer les gens qui veulent sortir de l’ascenseur. Enfin, en attendant d’être appelé à un nouvelle mission, il va sagement se brancher à la station de recharge.
Satisfait de son Botlr, l’enseigne Aloft a déjà “engagé” un deuxième robot Relay auprès de la société Savioke pour servir les clients du Aloft Silicon Valley. “Nous nous sommes embarqués dans la voie robotique il y a quelques années déjà, et cette expérience a prouvé ce que nous suspections : les humains et les robots peuvent coexister et travailler de concert pour accroître l’expérience client”, remarquait Brian McGuinness, directeur global des marques Select de Starwood à l’occasion de l’annonce de cette embauche. Fort de ce constat, une nouvelle enseigne, Crowne Plaza, a été séduite par les robots développés par Savioke. Baptisé Dash par la marque du groupe IHG, le premier d’entre eux va bientôt être testé en live. Où donc ? Dans la Silicon Valley bien sûr, à Milpitas.
Mais les robots ne sont pas seulement adaptés au milieu hôtelier. Récemment, le croisiériste Royal Caribbean a employé derrière le comptoir du Bionic Bar de son géant des mers Anthem of the Seas deux bartenders d’un genre nouveau. Répondant au doux nom de Kuka Agilus KR10 R1100 SIXX, ils ne sont certes pas aussi sexy que Tom Cruise, mais ils sont au moins aussi efficaces ! Conçu sous la supervision de l’ingénieur Carlo Ratti, directeur du SENSEable City Lab du MIT, et distribué par la société italienne Makr Shakr, ce système de bar robotique peut composer en une nuit près de 540 cocktails que les clients auront préalablement commandés via une tablette interactive. Et demain ? Des chercheurs de l’université de Cornell travaillent sur un robot barista, intelligent de surcroit car il s’adapte à d’autres machines à café que celles sur lesquelles il a été formé. Il ne faudra probablement pas longtemps avant qu’apparaissent ces nouvelles machines derrière les comptoirs. Les directeurs financiers des groupes hôteliers verront sans doute d’un très bon oeil l’émergence de ces nouveaux collaborateurs. Mais les clients ? Les robots seront-ils capables de reconnaître les habitués et de leur offrir de temps à autre un verre à l’oeil ? Sauront-ils deviser avec eux de tout et de rien ? Le pire, ou le mieux, c’est que c’est fort possible !
Dans les aéroports aussi
Début juillet, Japan Airport Terminal a conclu un partenariat avec Cyberdyne, une start up de l’université de Tsukuba, pour mettre en pratique la technologie robotique à l’aéroport de Tokyo Haneda, aussi bien en coulisses, pour l’entretien ou le transport des bagages, qu’au contact direct des passagers. Dans le même ordre d’idée, le projet Spencer, soutenu par plusieurs centres de recherche européens, dont le CNRS, mais aussi et surtout par KLM, explore la piste de robots cognitifs, à même de guider les voyageurs dans les hubs tentaculaires comme Amsterdam Schiphol et de faciliter ainsi le transfert des passagers d’un vol long-courrier vers une liaison au sein de l’espace Schengen. Fin de la recherche en 2016.
Les robots dans les hôtels, c'est maintenant
- Les robots dans les hôtels, c’est maintenant
Témoignage : Steve Cousins, PDG de Savioke