
Que représente l’organisation de la conférence Convening Leaders pour Singapour ?
Edward Koh – Le Singapore Tourism Board (STB) et Marina Bay Sands se sont associés à PCMA pour mettre en place un centre de diffusion mondial pour Convening Leaders, afin d’accueillir les conférenciers, les groupes d’experts et proposer des expériences en face à face. C’est la première fois que l’événement est organisé en dehors de l’Amérique du Nord en 64 ans. Cet événement hybride souligne la position de Singapour en tant que hub mondial pour les entreprises. Il reflète également nos efforts pour réimaginer l’avenir des événements MICE, et notre capacité à accueillir de tels événements de manière sûre et efficace grâce à des protocoles stricts et à l’utilisation de la technologie.
Doit-on considérer cet événement comme la renaissance du MICE à Singapour, après plusieurs mois de paralysie ?
E. K. – Dès le mois d’octobre 2020, le Singapore Tourism Board a commencé à accepter les demandes des organisateurs pour des projets pilotes d’événements MICE. Grâce à nos tests, nous continuons à explorer des formats innovants, et à adapter les protocoles existants pour garantir que les événements se déroulent en toute sécurité. Le challenge, c’est que tout le monde adhère à tout le protocole sanitaire. Le secteur du MICE a réagi de manière encourageante, en organisant une trentaine d’événements. TravelRevive a ainsi été le premier salon international du voyage à se dérouler physiquement en Asie Pacifique pendant le COVID-19, avec des participants et des exposants locaux et étrangers. L’événement a attiré près de 1 000 participants sur place, dont environ 65 invités étrangers originaires de 14 pays d’Asie, du Moyen-Orient et d’Europe.
L’organisation de Convening Leaders, et bientôt celle du Forum Economique Mondial, font-elles de Singapour la destination MICE la plus sûre de la région, voire de la planète ?
E. K. – Effectivement, nous accueillerons le Forum Economique Mondial très bientôt, en mai. C’est bien sûr un très gros dossier pour le Singapore Tourism Board. Davos accueille habituellement 3000 invités principaux, auxquels il faut ajouter des équipes conséquentes. Singapour est une destination qui a fait de la sécurité une priorité. C’est pourquoi nous parvenons progressivement à faire redémarrer l’activité MICE.
Toutes les destinations assurent avoir fait de la sécurité leur priorité : qu’est-ce qui a fait la différence à Singapour ?
E. K. – Nous avons développé une approche très pragmatique, basée sur des tests et faisant fi de toute idéologie. Face au succès de nos expérimentations nous avons pu progressivement revoir le nombre de participants à la hausse, passer de groupe de 20 à 50 personnes. Nous essayons de repousser les limites. Et quand les choses ne fonctionnent pas, nous changeons notre façon de faire. Il faut s’adapter, y compris chez les organisateurs. Pour l’un des premiers événements que nous avons accueillis il y a quelques mois, les organisateurs ne souhaitaient pas changer de format pour passer au virtuel. Mais ils n’ont pas eu le choix. Et à leur grande surprise, ils ont réussi à toucher une audience plus large que jamais, et surtout des types de participants qu’ils n’auraient jamais réussi à atteindre normalement. Comme s’ils découvraient un univers parallèle qui leur était inconnu.
Notre approche ne repose pas sur l’élimination du risque, mais sur sa gestion
Avez-vous atteint vos objectifs, ou prévoyez-vous d’autres mesures ?
Edward Koh – Notre approche ne repose pas sur l’élimination du risque, mais sur sa gestion. Si l’on voulait éliminer tout risque, on pourrait annuler tout événement, fermer les frontières, et considérer que nous sommes en sécurité. Ce n’est pas possible, notre ouverture est essentielle à notre survie.
Singapour est souvent associée au concept de « smart city » : y a-t-il donc une « smart » gestion de la crise ? Quel est le rôle de la technologie ?
E. K. – Nous essayons toujours d’utiliser la technologie pour nous aider. L’application mobile Trace Together en est un bon exemple. Chaque jour, l’application me signale si j’ai été en contact avec un potentiel cas positif. Cela donne l’assurance à chacun de nous qu’il est en sécurité. C’est l’un des exemples de l’apport des nouvelles technologies sur ce dossier.
Singapour est-elle aujourd’hui une « destination hybride » ?
E. K. – Oui, de fait, puisque le volet physique est limité, que les frontières ne sont pas vraiment ouvertes. Mais c’est là où l’on voit que la technologie nous aide à surmonter les distances, et toutes sortes de barrières. Par exemple ici, au Marina Bay Sands, ils ont transformé cette pandémie en opportunité pour investir dans un Hybrid Broadcast Studio, une infrastructure de pointe, qui permet l’organisation d’événements très innovants, en permettant des interactions avec des interlocuteurs à travers le monde. C’est l’un des nombreux exemples de projets menés à Singapour qui exploitent les possibilités offertes par l’hybride. Par ailleurs, il est parfois difficile de réunir des conférenciers de tout premier plan à un événement. Mais toutes ces technologies virtuelles comme le système d’hologrammes permettent à des « VIP » de participer à la conférence.

La demande pour ces événements hybrides s’inscrira-t-elle dans la durée selon vous ?
E. K. – Je le crois, car cela apporte une nouvelle dimension aux événements. C’est comme disposer d’une application mobile en plus sur son téléphone : c’est fonctionnel, facile à utiliser, et ça facilite la vie au quotidien ! L’alliance du physique et du virtuel devrait perdurer. La part de chacune de ces composantes évoluera probablement, mais cela offre de telles possibilités aux organisateurs d’événements en termes de contenu, d’expérience…
Y a-t-il d’autres développements technologiques prévus à Singapour dans le secteur du MICE ?
Edward Koh – De plus en plus de choses vont apparaître, non seulement ici au Marina Bay Sands, mais aussi dans d’autres centres de conférences comme Suntec, ou dans d’autres hôtels qui ont aussi des projets en ce sens. Du point de vue du Singapore Tourism Board, nous avons une stratégie axée sur la réalité augmentée, en ce sens où il s’agit d’une réalité « gamifiée », qui permette à notre audience de mieux visualiser ce dont nous parlons.
Ne craignez-vous que les avancées technologiques aboutissent à des salles de conférences quasi-désertes, les participants suivant l’événement depuis leur salon, un casque de réalité augmentée sur la tête… ?
E. K. – C’est une crainte que l’on peut avoir. Mais en ce qui me concerne, à l’approche de cet événement PCMA, j’avais hâte de quitter mon domicile pour rejoindre le Marina Bay Sands et participer à la conférence. Beaucoup de mes amis et collègues sont dans le même cas. Il y a un besoin humain de se rencontrer et d’interagir avec ses pairs. Le virtuel facilite certaines choses, mais parfois vous voulez juste vous en affranchir et goûter à la « vraie vie ».
Y a-t-il une coordination entre les grandes destinations MICE à l’international, peut-être pour définir un label commun en termes de protocole sanitaire par exemple ?
E. K. – C’est une très bonne idée ! Singapour est membre de BestCities Global Alliance, qui regroupe 12 destinations, comme Madrid, Copenhague, Tokyo, ou Melbourne… Nous partageons le même état d’esprit, et nous échangeons pour partager des bonnes pratiques, des informations utiles sur l’organisation d’événements, pour apprendre les uns des autres. Il serait donc effectivement judicieux de mettre en place un ensemble de mesures de sécurité adaptées, et d’identifier les points à améliorer, pour nous assurer que les participants peuvent s’attendre au même niveau de sécurité dans chacune des destinations de l’alliance.