
La Suisse des voyageurs d’affaires se concentrent généralement autour de quelques destinations emblématiques : Genève, Bâle, Lausanne ou Zurich. Et pourtant, à l’ombre de ces quatre métropoles, vit une autre Suisse, prospère, plus discrète. Une Suisse qui n’en constitue pas moins une alternative dans le cadre d’un congrès, d’un voyage de stimulation ou tout simplement dans le prolongement d’un déplacement d’affaires.
L’avantage de la Suisse est sa petite superficie. Et un réseau ferroviaire qui rend la moindre commune facilement accessible. On est en général rarement à plus d’une heure d’une ville importante en train. Le réseau des chemins de fer suisses CFF est un modèle du genre en Europe avec son extraordinaire densité de gares et une ponctualité réglée comme du papier à musique.
Le temps. C’est vrai que les Suisses le pratiquent à la perfection. Déjà par leur ponctualité légendaire – qui peut parfois s’avérer irritante. Et également par la maîtrise de sa représentation. Dans de nombreuses villes, les horloges ont rythmé – et rythment encore – le quotidien des habitants. Et nombre d’entre elles sont, de fait, devenues les emblématiques symboles de leur ville. A Berne, par exemple, la tour du Zytglogge (un dialecte bernois dérivé de l’allemand pour ‘tour de l’Horloge’) figure sur tous les souvenirs de la cité. Mais également à Lucerne, Neuchâtel, Soleure ou Zurich, on ne peut qu’admirer ces horloges géantes qui dominent la masse urbaine des maisons. Des chefs d’œuvre de précision et d’art avec leurs sculptures…

La notion du temps, reflet de la psyché suisse
Et puis il y a l’horlogerie, là encore un monde que l’on associe intimement à la Suisse. Une industrie dont les origines remonteraient, selon les légendes, au XIVe siècle et qui serait née dans les hautes vallées et montagnes de la région de Neuchâtel. Pour la transhumance des bêtes et conserver le rythme des saisons, ces paysans fabriquèrent des garde-temps, ancêtres d’horloges. Durant les longs hivers, ces montagnards ne sont pas restés inactifs et se sont occupés tant à réparer leurs outils d’éleveurs, dont le mécanisme d’horlogerie.
Au XVIIe siècle, les Huguenots chassés de France s’établissent à leur tour le long de l’arc jurassien, entre Genève et Schaffhouse, près du Rhin. La région de Neuchâtel va concentrer alors une grande partie de cette activité horlogère. A la fin du XVIIIe siècle, près de 140 000 montres étaient produites à Genève et dans les montagnes du Jura neuchâtelois. Enfin au XIXe siècle, deux cités, Le Locle et La Chaux-de-Fonds, vont se construire autour d’un urbanisme horloger. Et le développement des deux cités répond aux besoins de cette industrie et forment ce qui est aujourd’hui reconnu comme étant le cœur de l’horlogerie mondiale.
Les deux villes se tournent alors entièrement à cette production avec des rues tracées au cordeau, imbriquant habitat et ateliers, qui correspondent aux besoins de la production horlogère. Selon l’UNESCO, « ces sites constituent un remarquable exemple de villes ordonnées par une activité mono-industrielle, bien conservées et toujours en activité ». Une planification si efficace que, dans Le Capital, Karl Marx prend comme exemple l’industrie horlogère du Jura suisse et invente à propos de La Chaux-de-Fonds le terme de « ville-manufacture« .

Cette tradition d’excellence se poursuit aujourd’hui et peut être le thème d’un parcours dans ce monde du temps. Des déambulations qui permettent de découvrir trois villes, véritables bijoux architecturaux. A la blondeur de la pierre à Neuchâtel qui magnifie les imposantes demeures du XVIIIe siècle de style classique français s’oppose le gris clair et lumineux des 200 maisons patriciennes gothiques de Fribourg, l’une des plus belles cités médiévales de Suisse.
Le point d’orgue d’un tel voyage se trouve à Berne, la capitale de la Confédération. Dans sa vieille ville lovée le long de la rivière Aare, on déambule sous les six kilomètres d’arcades entre maisons de la Renaissance et de l’époque baroque. Seuls le bruissement de l’eau des fontaines et les cloches des horloges égrenant les heures troublent la quiétude de la vieille ville. A moins qu’ils ne fassent l’éloge de la lenteur du temps qui passe.