Efficacité et maîtrise de sa destinée: à Singapour, on est fier, très fier même, de savoir anticiper, planifier, développer et surtout réussir. La pandémie de Covid-19 aura certes balayé quelques certitudes de la Cité-Etat dont l’économie s’appuie sur les échanges avec le reste de la planète. En 2020, le PIB s’est ainsi contracté de 5,8 %, moins cependant que dans les premiers scénarios qui prédisaient une baisse comprise entre 6 % et 7%. Si le gouvernement prévoit une croissance du PIB de 5 % à 6 % cette année, la chute de 2020 restera un événement pour la Cité-Etat. Ce fut en effet sa première grave récession du XXIe siècle.
Le tourisme en souffrance en 2020
L’industrie des services – dont fait partie le secteur du tourisme – a été la plus affectée par cette récession avec une contraction de 6,9 % en 2020. La totale fermeture des frontières s’est traduite par la quasi complète disparition des visiteurs. L’an passé, Singapour aura enregistré 2,81 millions d’arrivées internationales, une chute de 87,1 % par rapport à 2019.
Mais ce chiffre est trompeur, car la chute a été encore plus brutale. Le seul premier trimestre avait concentré 97% des arrivées totales (2,73 millions). Sur le reste de l’année, la métropole n’aura enregistré que 29 550 arrivées internationales, un chiffre en baisse de 99,8 % par rapport à 2019.
L’hôtellerie a connu un taux d’occupation moyen l’an passé de 56,7 %, en baisse de trente points par rapport à 2019. Avec une chute induite du prix des nuitées. Le prix moyen d’une chambre a en effet atteint 95,50 euros l’an dernier (152 S$). Dans le détail, ce prix est passé de 144 euros en janvier 2020 à 42 euros en mai, son plus bas absolu. En décembre 2020, une nuitée est remontée à 113 euros en moyenne. Sur les deux premiers mois de 2021, le prix moyen reste au dessus des 90 euros. Ce qui représente encore une baisse de 36% par rapport à début 2020. L’hôtellerie a cependant été partiellement soutenue par la réquisition de chambres pour des quarantaines. Ces dernières ont, de fait, généré l’équivalent de 80 000 nuitées.
Dans ce contexte, l’office de tourisme de Singapour cultive pourtant un optimisme de bon aloi. Dans un discours tenu début février, Keith Tan, directeur général du Singapore Tourism Board (STB), indiquait que, « [si] le secteur du tourisme de Singapour avait dû se battre pour sa survie en 2020, nos entreprises touristiques ont fait preuve d’une immense résilience et d’une grande capacité d’adaptation tout au long de cette période difficile, en réinventant leurs modèles commerciaux et en tirant parti de la technologie pour trouver des solutions dans un monde touché par le Covid.«
Le directeur général du STB exprimait alors sa confiance dans la reprise du tourisme et l’attrait potentiel de Singapour, tout en estimant également qu’un retour aux 19 millions de visiteurs internationaux de 2019 n’interviendra pas avant quelques années. « Il est peu probable que les voyages internationaux de masse reprennent de manière importante en 2021, mais le STB continuera à se tenir aux côtés de ses partenaires du secteur pour préparer la reprise et commencer à construire un avenir meilleur et plus durable pour le tourisme, » indiquait encore Keith Tan.
Singapore Inc., « l’entreprise Singapour », travaille effectivement à son retour sur la scène touristique. Elle a développé toute une batterie de technologies virtuelles – dont celles de réalité augmentée – pour stimuler l’envie de venir de nouveau dans la métropole. Le Singapore Food Festival a par exemple attiré 500 000 visiteurs virtuels et les festivités de Noël plus d’un million…
Assouplissements et nouveaux protocoles pour le MICE
Mais c’est dans le domaine du MICE que Singapour a le plus avancé dans sa quête d’une nouvelle normalité. L’organisation d’événements et meetings hybrides a de fait repris dès le mois de juillet. Entre juillet 2020 et mars 2021, une soixantaine d’événements ont déjà eu lieu, accueillant quelque 7 000 participants. Sans cluster déclaré !
C’est une stratégie importante pour Singapour. En effet, le secteur du MICE soutenait avant la pandémie plus de 34 000 emplois, l’industrie de l’événementiel et des congrès générant près de 1% du PIB de l’île-Etat. Soit une valeur ajoutée économique de 2,4 milliards d’euros.
La montée en puissance des activités MICE a débuté avec des projets pilotes ayant un plafond de 50 participants par événement. En octobre, la jauge est passée à 250 participants par événement. Nouvelle étape importante: une jauge de 750 personnes par événement va désormais s’appliquer à partir du 24 avril prochain.
Si le gouvernement approuve la tenue d’une manifestation – première étape nécessaire-, divers protocoles de sécurité sanitaire se mettent alors en place. Dernier en date : un « Pre-Event test » (« test préalable à un événement ») sera systématiquement effectué pour toute manifestation accueillant plus de 250 délégués. Il s’agira d’un test au Covid-19 pour tout participant qui souhaite être présent. Seul un délégué avec un résultat négatif au test sera autorisé. Les formalités à ce test vont être précisées.
L’usage des technologies va encore se renforcer pour rendre les réunions et congrès encore plus sûrs. Un test grandeur nature a ainsi été effectué fin mars lors de la tenue de Geo Connect Asia (GCA) 2021. La conférence intégrait des « Geo Suites », dans les faits une salle de réunion transformée en un stand unique par exposant. Il permettait ainsi de minimiser les échanges.
Une plateforme technologique « Safe Event » a pu également être testée. Cette solution s’appuie sur une technologie géospatiale pour suivre les mouvements des délégués tout au long de l’événement via une application et un suivi de la température corporelle. Il identifie également un exposant par la reconnaissance faciale.
Ce type d’application – qui de fait s’avère intrusive – n’est-elle que temporaire ? Rien n’est moins sûr à Singapour, dont l’obsession de surveillance de la population présente sur son territoire reste bien vivante.