
Un trafic passagers qui a plus que doublé entre 2021 et 2022. Voilà qui donnerait de quoi se réjouir à Fraport Slovenia, l’autorité aéroportuaire gérant l’aéroport international de Ljubljana. L’aéroport de la capitale slovène a en effet accueilli plus de 977 000 passagers en 2022, contre 431 000 un an auparavant.
Sauf que ce résultat est plutôt médiocre comparé aux autres aéroports de l’ex-Yougoslavie. En fait, le nombre de passagers en 2022 n’a représenté que 56,6% du trafic de 2019, qui atteignait alors 1,73 million de passagers. Pour comparaison, le nombre de passagers à Skopje, Zagreb et Belgrade en 2022 a représenté pour chaque aéroport 91% du trafic de 2019. A Sarajevo, la fréquentation de l’aéroport est même supérieure de 20% à 2019.
Il y a donc un problème à Ljubljana: l’absence d’un transporteur aérien national depuis la faillite d’Adria Airways en 2019. L’aéroport offre certes des vols de 18 compagnies aériennes vers une vingtaine de destinations cet été. Ljubljana est par exemple très bien relié à Paris avec 11 vols hebdomadaires d’Air France depuis CDG et deux vols de Transavia depuis Orly (durant la saison d’été). Brussels Airlines propose également six vols hebdomadaires entre Bruxelles et la capitale slovène.
Un marché slovène trop petit pour attirer les compagnies?
Mais le nombre de vols vers de grands hubs reste toujours très limité. Ljubljana est très largement dépendant du groupe Lufthansa. Celui-ci est presque en situation de monopole avec 39 vols hebdomadaires vers Bruxelles, Francfort, Munich et Zurich.
Les seules alternatives ont pour nom Air France sur Paris CDG, LOT sur Varsovie et Turkish Airlines sur Istanbul. British Airways vole certes sur Londres Heathrow mais uniquement sur la saison d’été. Même constat pour Finnair sur Helsinki, seulement desservi en été. Et si Amsterdam Schiphol est bien desservi par Transavia, la compagnie low-cost n’offre pas de services de correspondances. On est enfin également surpris par l’absence de vols vers l’Espagne, l’Italie, Berlin ou encore Vienne…
Le gouvernement slovène, élu l’an passé, a décidé d’analyser s’il était donc nécessaire de créer un nouveau transporteur. Une décision qu’avait refusé de prendre le précédent gouvernement ultra-conservateur. Un groupe d’experts mandaté par le gouvernement a récemment rendu ses conclusions au ministère de l’infrastructure. Elles seront officiellement présentées dans les prochaines semaines.
Selon le site local d’informations « 24ur », l’étude a révélé que le marché slovène est trop petit pour que d’autres transporteurs puissent se substituer à l’ancienne compagnie nationale Adria Airways. Mais le potentiel existe pour une compagnie « Made in Slovenia ». Il suffit par exemple de regarder le Luxembourg. Avec ses 650 000 habitants (trois fois moins que la Slovénie), il n’en possède pas moins sa propre compagnie, Luxair.
Le MICE à l’agonie sans connectivité aérienne
L’étude aurait conclu que la mauvaise connectivité aérienne de la Slovénie est un handicap pour l’économie – et en particulier le tourisme. La disparition d’Adria aurait coûté plusieurs centaines de millions d’euros à l’économie locale.
Interrogé par le site d’informations 24ur, Marko Kastelic, ancien pilote d’Adria, donnait ainsi un exemple édifiant dans le domaine du MICE: « Je crois savoir qu’il y a quelques jours, un grand congrès médical s’est tenu en Slovénie. Les participants étaient transportés en voiture et en bus depuis les aéroports environnants. Je ne pense pas que ce soit la meilleure publicité pour l’organisation de tels événements ».
La ministre slovène de l’infrastructure, Alenka Bratušek, a déjà fait campagne en faveur d’une nouvelle compagnie aérienne tout en appelant à une certaine prudence. « Notre pays a déjà eu une mauvaise expérience avec sa compagnie aérienne nationale. Mais nous pouvons entendre les voix des milieux économiques, qui affirment que la Slovénie a besoin du retour d’un tel transporteur », déclarait-elle à la télévision slovène.
Ce petit marché a de fait du mal à attirer les compagnies aériennes pour le lancement de nouvelles liaisons. Un récent appel d’offres du gouvernement avec subventions à la clé a été un semi-échec. Seuls Luxair et Air Monténégro y ont pris part.
Ce mois de juin, le gouvernement devrait donc rendre sa décision. Si elle est positive, la Slovénie se donnera une année pour mettre sur pied sa nouvelle compagnie nationale. Bienvenue donc à Adria 2.0 ?