P.-O. Bard (Avis) : « la location courte durée telle qu’elle existe perdurera »

Activité affaires, adoption des véhicules électriques par les entreprises, bornes de recharge : Pierre-Olivier Bard, directeur France du groupe Avis Budget, revient sur l'actualité de la location de voitures.

Voyez-vous une évolution positive des voyages d’affaires depuis l’an dernier ?

P.-O. Bard – Il n’y a pas eu de réelle modification. Son niveau reste toujours inférieur à ce qu’il était en 2019, même si notre activité est maintenant légèrement en train de remonter. Cette évolution montre que le marché corporate est assez dynamique. Le segment affaires s’est stabilisé sur de nouvelles bases. Tous les clients le disent, certains voyages ont disparu et ne réapparaîtront pas, notamment toutes ces réunions aux sièges des entreprises pour lesquelles la visio se pose en alternative. Ce type de réunion ayant diminué, les déplacements correspondants ont chuté d’autant. En revanche, on voit que les déplacements en province, par exemple des commerciaux ou des ingénieurs, existent et existeront toujours. Dans ce cadre, notre croissance prendra des formes assez classiques, portée par l’acquisition de nouveaux clients et l’évolution de nos flottes.

Concernant ces flottes, le passage à l’électrique est sans doute une des priorités ?

P.-O. Bard – C’est la grande évolution, et qui ne va aller qu’en s’accélérant. Au regard de la loi LOM, le renouvellement des flottes doit intégrer 10% de véhicules à faible émission, c’est-à-dire hybride, rechargeable et électrique. L’année prochaine, c’est 20%, ce qui veut dire encore davantage de véhicules hybrides et électriques en 2024. D’autant que nous renouvelons 100 % de notre flotte chaque année, comparé aux véhicules d’entreprise et des loueurs longue durée qui ne sont renouvelés que d’un quart. Le nombre de voitures électriques disponibles monte donc beaucoup plus vite.

Vos entreprises clientes se convertissent-elles aussi rapidement ?

P.-O. Bard – Jusqu’ici, les entreprises n’incluaient pas les véhicules électriques dans leurs programmes de location de voitures courte durée, mais seulement les catégories classiques. Et cela, même si, depuis plus d’un an, nous répondions à tout appel d’offres en y mêlant nos catégories électriques. Aujourd’hui, de plus en plus de clients, qui ont eux mêmes verdi leur flotte en interne, nous demandent de les intégrer parmi les véhicules autorisés. Maintenant que les véhicules commencent à apparaître dans les systèmes, il faudra voir comment cela se traduit dans les réservations. Avant, les voyageurs d’affaires ne pouvaient même pas les réserver. L’alternative électrique pouvait leur être proposée, mais seulement au comptoir, les voyageurs professionnels étant d’ailleurs assez enclins à la tester. Le temps que ces modèles soient adoptés nous laisse un peu de temps de notre côté pour créer les infrastructures nécessaires à la recharge des voitures.

Comment déployez-vous ces solutions ?

P.-O. Bard – Avis travaille avec la société française Bump pour installer ces bornes électriques dans ce qu’on appelle les bases arrière, là où on stocke et nettoie les voitures. En aéroport et dans les gares, les bases avancées appartiennent aux gestionnaires, et c’est à eux d’installer l’infrastructure nécessaire. Et là, on est sur un temps long… Nous avons donc décidé d’investir et d’installer des bornes dans nos propres infrastructures pour permettre à nos clients d’avoir des voitures chargées au départ.

Cependant, par delà vos solutions, l’adoption de l’électrique dépend aussi du déploiement de bornes de recharge sur tout le territoire.

P.-O. Bard – Cet écosystème est compliqué. La grande évolution observée sur les six premiers mois de l’année, c’est de voir maintenant des bornes partout sur les aires d’autoroute. Ce qui est vraiment rassurant pour nos clients. Maintenant, c’est l’évolution du réseau secondaire qui sera importante. On trouve souvent des bornes lentes, mais ce qui manque encore aujourd’hui, ce sont des solutions de recharge rapide. Pour un client qui doit rendre sa voiture dans une gare, attendre trois heures pour la recharger n’est pas envisageable. C’est donc la prochaine étape clé.

Avis va commencer le déploiement de bornes de recharge de véhicules électriques.
Avis va commencer le déploiement de bornes de recharge de véhicules électriques.

Les voyageurs d’affaires avaient l’habitude de rendre leur voiture le plein d’essence fait. Votre demande est la même pour les modèles électriques ?

P.-O. Bard – Exactement. Mais aujourd’hui, nous laissons une tolérance, c’est-à-dire que si le client revient avec 80% d’autonomie, rien ne lui sera demandé. On ne charge qu’en dessous de ce niveau. Et cela à travers des forfaits et non une facture au kilowatt/heure pour ne pas trop pénaliser le client. Ce système est fait pour les rassurer. Les clients ont toujours les mêmes peurs concernant l’autonomie des voitures électriques, qui s’est d’ailleurs beaucoup améliorée. Pour autant, il ne faut pas oublier qu’un client fait 70 km en moyenne dans une journée. Donc, toutes les voitures électriques ont cette capacité, ce n’est pas un vrai sujet aujourd’hui.

En parallèle, avez-vous lancé de nouveaux services ces derniers mois ?

P.-O. Bard – Nous avons mis en place des cartes d’abonnement Drive qui garantissent des niveaux de remise allant de 10 à 20% en permanence. Une offre qui vise essentiellement la clientèle loisirs. De la même manière, nous avons de nouveaux produits, notamment Quick Pass, un système qui permet de faire toutes les étapes de réservation en amont et de passer moins de temps en agence. Nos membres Preferred pouvaient déjà le faire, parmi lesquels beaucoup de voyageurs d’affaires. Nos autres clients ont maintenant cette possibilité, soit par Internet, soit au téléphone. Ne reste plus que le contrôle du permis en station, qui est obligatoire. Suite à la pandémie, nous continuons à renforcer la partie digitalisation.