Design des cabines d’avion : interview d’Anaïs Marzo, responsable marketing cabine Airbus

Pour Anaïs Marzo, responsable marketing cabine Airbus, le plus important est d'améliorer l’expérience à bord et le sentiment de bien-être pour les passagers.
La nouvelle cabine AirSpace
Ce à quoi ressemble la cabine classe affaires "Airspace" d'Airbus sur l'A330 (Photo: Airbus)

Sur quels critères travaille Airbus pour améliorer le confort en cabine ?

Anaïs Marzo – Certaines personnes peuvent être stressées lorsqu’elles prennent l’avion et c’est pourquoi il existe de nombreux éléments sur lesquels Airbus travaille pour améliorer l’expérience à bord. Ce sont à la fois des éléments visibles et invisibles pour les passagers. Comme par exemple, les scénarios de lumière. La technologie d’éclairage LED sur les vols long-courriers permet à l’horloge interne du passager de gagner jusqu’à 3 heures sur l’effet du décalage horaire. Nous sommes particulièrement fiers de ce qu’Airbus a réussi dans ce domaine avec la possibilité d’avoir jusqu’à 16 millions de scénarios lumineux. Nous travaillons aussi sur les zones de température. Il est possible d’adapter la température à chaque espace, là où par exemple il y a davantage de passagers, il est possible de diffuser plus d’air frais. Tout cela permet d’améliorer le bien-être et le confort. Enfin, un autre élément essentiel au bien-être en cabine est le contrôle du niveau de bruit. Nous travaillons sur plusieurs facteurs : le bruit provenant de l’extérieur de l’avion, celui des systèmes à l’intérieur de l’avion, du bruit intermittent des systèmes, et enfin du bruit des éléments intérieurs comme les trappes et les verrous. Les avions Airbus de nouvelle génération sont considérés aujourd’hui parmi les plus silencieux au monde.

Anaïs Marzo (Photo: C. Sadonnet-Master Films)

Peut-on créer un design révolutionnaire de cabine ? Dans quels domaines ?

Anaïs Marzo – Un design révolutionnaire pourrait être possible avec l’arrivée après 2035 de nouveaux avions propulsés à l’hydrogène sur lesquels nous travaillons, et qui pourraient avoir un design différent des avions conventionnels actuels, comme par exemple une forme “d’aile volante”. Mais d’ici là, nous parlons plutôt d’une évolution continue de la cabine. Ce sont par exemple des plafonds plus hauts apportant une plus grande sensation d’espace, des coffres à bagages plus grands et offrant près de 60% de capacité en plus sur les nouveaux appareils de la famille A320. Nous sommes ainsi passés de 5 à 8 bagages sur 2 coffres. Nous avons également des hublots plus larges qui s’assombrissent à la carte sans volet externe. De plus on peut mentionner sur les nouveaux Airbus A350 des planchers totalement plats, sans câble apparent, avec les boîtiers associés miniaturisés sous les sièges, donnant plus d’espace pour les jambes de chaque passager.

Comment s’intègre la digitalisation à bord ?

Anaïs Marzo – En raison du Covid, nous avons beaucoup travaillé sur l’offre “sans contact” et sur des objets connectés à bord. Par exemple, une aide à la gestion de la nourriture avec la possibilité de scanner les offres de repas et de supprimer les menus papiers. Les passagers peuvent commander sur leur écran ou même réserver leur repas avant le vol lors de la réservation du billet, ce qui permet aux compagnies de mieux gérer les stocks et de mieux personnaliser le service.

Ecartement et inclinaison du siège en classe éco : existe-t-il des moyens de rendre la densification supportable ?

Anaïs Marzo – En classe économie, les fabricants de sièges ont beaucoup travaillé sur le confort. Si l’écartement entre les sièges a été légèrement réduit, de 32 à 30 pouces (81,5 cm à 76,2 cm), on a exactement la même offre de confort, voire plus de place pour le passager. Le design des sièges est plus ergonomique, la mousse de siège plus fine et néanmoins adaptée au confort de chaque passager, et l’intégration des porte-magazines dans le haut du dossier donne plus de place au niveau des genoux pour étendre ses jambes. Nous arrivons aussi à offrir 2,54 cm de plus par passager au niveau des épaules dans les cabines de la famille A320 ! Et ce, avec moins de poids pour l’avion…

Sur quoi peut-on justement réduire ce poids ?

Anaïs Marzo – Nous avons déjà beaucoup allégé les avions et nous pensons encore trouver des gains grâce aux nouveaux modèles de sièges, d’écrans vidéo tactiles, de boîtiers IFE plus petits [pour la vidéo]. Et bien sûr, il faut mentionner la structure même du fuselage, et les revêtements intérieurs des avions faits dans des matériaux composites plus légers. Nous travaillons également sur des designs en économie circulaire, visant à s’assurer que les matériaux utilisés seront réutilisables dans notre industrie ou ailleurs.

Peut-on imaginer des intérieurs évolutifs de cabines avec des espaces personnalisés par activité ?

Anaïs Marzo – Comme je l’ai souligné, il faudra certainement attendre la mise en service de nouveaux types d’avions bénéficiant d’une technologie et de designs nouveaux avant de voir émerger des concepts de cabines radicalement différents. Nous avons de nombreuses idées de type « espace famille » ou « zone de réunions » ….  Si par exemple nous décidons d’utiliser la soute pour y installer des couchettes, il faut en parallèle trouver des solutions pour embarquer le fret et voir comment rendre ces couchettes accessibles aux personnes à mobilité réduite. Toutes ces questions autour de nouveaux aménagements restent encore limitées dans leur mise en application en raison des exigences de certification extrêmement élevées dans notre secteur aéronautique. Mais nous avons beaucoup d’idées et nous continuons à innover dans la cabine pour offrir toujours plus de confort aux passagers.