Les ambitions de Kasada, partenaire d’Accor en Afrique

Soutenant le développement de Accor en Afrique, Kasada investit dans la construction ou la reprise d'hôtels, repositionnés dans un esprit lifestyle, espaces de coworking compris.
A Kigali, l'Umubano a été repris par Kasada et sera prochainement transformé en Mövenpick.
A Kigali, l'Umubano a été repris par Kasada et sera prochainement transformé en Mövenpick.

Kasada. Ce nom ne dira sans doute que peu de choses aux voyageurs d’affaires habitués aux grandes chaînes hôtelières internationales. Pour autant, ses activités ne sont pas anodines pour les professionnels amenés à se rendre régulièrement en Afrique. Lancée en 2019, cette plate-forme d’investissement est en effet soutenue par Accor et le fonds souverain du Qatar, à hauteur respectivement de 150 millions et de 350 millions d’euros. Un acteur très actif ces deux dernières années et dont le portefeuille, initié par le rachat de huit propriétés d’AccorInvest à Dakar, Abidjan et Douala, a doublé en 18 mois pour atteindre 17 hôtels aujourd’hui, avec une présence dans huit pays. « L’ambition à terme est de couvrir aussi bien l’Afrique francophone que l’Afrique de l’Est et Australe et d’avoir un bon maillage des grandes villes subsahariennes comme Lagos« , précise Olivier Granet, PDG de Kasada Capital Management.

Naturellement, à travers ces hôtels liés en contrats de management avec l’une ou l’autre des marques Accor, Kasada a pour objectif de soutenir la croissance du groupe français sur un continent africain où sa stratégie d’asset light est plus compliquée à mettre en place. « A l’exception de l’Afrique du Sud et du Maroc, où vous trouvez des banques et des investisseurs institutionnels pour accompagner les projets hôteliers, c’est plus difficile ailleurs, explique Olivier Granet. D’où l’idée de cette plate-forme capable d’accompagner ces projets de développement et de faire face aux contraintes locales d’accès au financement. » Des difficultés qui existaient avant la crise, d’où la raison d’être de Kasada, mais qui se sont « encore renforcées aujourd’hui« , constate le PDG de cette société.

A cet égard, la pandémie a modifié la nature des projets en cours. Alors qu’avant la crise sanitaire, Kasada se concentrait surtout sur la construction de nouveaux hôtels, son activité est maintenant au trois-quarts constituée par la reprise de propriétés existantes. « D’une part, parce qu’avec l’augmentation des taux d’intérêt et des coûts de construction, l’environnement macro-économique limite la capacité de faire des projets en green field, remarque le PDG de Kasada, mais aussi parce que de nombreux hôtels ont besoin d’aide en sortie de crise. » Réinvestir dans des hôtels fatigués, les repositionner, reformer leurs équipes : la plate-forme d’investissement se concentre aujourd’hui à amorcer de nouveaux cycles.

« L’ambition à terme est de couvrir aussi bien l’Afrique francophone que l’Afrique de l’Est et Australe« ,

Olivier Granet PDG de Kasada Capital Management

Parmi ces établissements entrés récemment dans son giron, Kasada compte notamment un hôtel du groupe sud-africain Tsogo Sun à Lagos ou encore deux hôtels indépendants à Windhoek, en Namibie, les Safari Hotels & Conference Center. Adossés à un centre de congrès de 1 400 places, l’un d’eux deviendra un ibis Styles et l’autre un Mövenpick. A Kigali, Kasada a aussi repris le premier hôtel international de la capitale rwandaise, l’Umubano. Une propriété de l’Etat passée sous plusieurs enseignes dans son histoire – Le Méridien, Novotel, Laico entre autres – avant de cesser totalement son activité. Après rénovation, il entamera une nouvelle vie, là aussi sous la marque Mövenpick.

Quant au Cape Grace en Afrique du Sud, un établissement de luxe acquis en mars dernier et idéalement posé sur le Victoria & Albert Waterfront du Cap, « il a vocation à être l’un des plus beaux hôtels d’Afrique« . De même qu’à être intégré à l’une ou l’autre des marques de luxe de Accor après une rénovation visant, entre autres, à offrir au lieu la certification durable EDGE. « Une ambition que nous avons pour tous nos hôtels« , précise Olivier Granet.

Dans le cadre du repositionnement de ces actifs, Kasada va bientôt ajouter une nouvelle dimension : le coworking. En effet, l’investisseur a récemment annoncé la conclusion d’un accord de master franchise avec Wojo – un spécialiste du travail partagé qui fait aussi partie de la galaxie Accor – afin d’intégrer des espaces de bureaux dans ses établissements à partir du second semestre 2022. La crise sanitaire a montré à grande échelle la nécessité pour les hôteliers de diversifier leurs sources de revenus et le coworking s’inscrit autant dans ce cadre qu’une offre F&B attractive vis-à-vis de la clientèle locale. « Le coworking est un des éléments pour construire une offre interactive dans nos hôtels, en faire des lieux de vie répondant aux besoins des voyageurs internationaux comme aux attentes du marché local et régional« , remarque Olivier Granet.

Futur espace de coworking Wojo à Abidjan.
Futur espace de coworking Wojo à Abidjan.

« Cette collaboration avec Wojo était naturelle, car ils travaillent déjà là-dessus en Europe, souligne Khalil Ketari, directeur Flex ‘Office et Coworking dans l’hôtellerie de Kasada Capital Management. Nous inscrirons leurs espaces dans les phases de conception et de redesign de nos établissements, en donnant une part importante aux bureaux privatifs et partagés pour attirer des clients sur du long terme. » Parmi ces utilisateurs potentiels, des entreprises du CAC40 qui pourraient y installer leurs équipes locales dans un environnement correspondant aux standards de ces grands groupes – « la demande est forte de ce côté-là », remarque Olivier Granet -, mais aussi tout ce tissu d’entrepreneurs locaux à la « dynamique remarquable« , souligne Khalil Ketari.

Alors que le parc immobilier n’est pas toujours d’excellente qualité dans les métropoles africaines, cette offre de coworking intégrée aux hôtels donne des gages de sécurité aux entreprises, garantissant aussi la présence de la climatisation et d’une électricité 24/24, en plus du support d’équipes sur place. Autre atout du modèle coworking, une flexibilité d’usage par rapport aux baux traditionnels. « Sur le continent africain, la gestion du risque business est importante, ce qui joue en faveur de cette solution qui minimise les risques« , remarque le directeur Flex ’Office de Kasada.

Alors que Kasada commencera par implanter des espaces Wojo dans ses établissements, ce concept pourrait, dans un deuxième temps, être mis à la disposition d’autres propriétaires d’hôtels gérés par le groupe français, dans le cadre de l’accord de master franchise conclu avec Wojo. Avant d’envisager des espaces Wojo indépendants ? Olivier Granet ne semble pas fermé à cette perspective : « Un jour, pourquoi pas ? »