Interdiction des vols courts : l’Europe valide, le hub de CDG épargné pour l’instant

Bannir les vols domestiques quand le train offre une alternative en moins de 2h30 : le projet français a reçu l’aval de la Commission européenne. Les vols en correspondances sont dans le collimateur, mais échappent dans les faits au périmètre d’application.
Gare TGV à Paris CDG (c) Gwen Le Bras pour Groupe ADP
Gare TGV à Paris CDG (c) Gwen Le Bras pour Groupe ADP

La Commission Européenne valide l’intention du Gouvernement français de limiter les vols courts sur le réseau domestique. Sa décision a été publiée en fin de semaine au Journal officiel de l’UE, et saluée dans la foulée par le Ministre en charge du dossier. « M. Clément Beaune, ministre chargé des Transports, salue la décision de la Commission européenne qui déclare conforme au droit européen le projet de décret mettant en œuvre l’interdiction des lignes aériennes quand il y a une alternative de moins de 2h30 en train ». A première vue, une décision simple, résumée en un communiqué tout aussi simple, qui s’inscrit même dans la lignée de la Convention Citoyenne pour le Climat. Dans les faits, la situation est plus équivoque – en-deçà des préconisations de cette dernière, allant jusqu’à des trajets en train de moins de 4h…

Surtout, il n’est nullement fait mention dans le communiqué du ministère des vols de moins de 2h30 en correspondance, l’un des principaux points de friction du dossier, interdits dans la forme sans réellement l’être dans les faits. La communication d’Air France estime d’ailleurs que la décision de la Commission Européenne « ne change pas grand-chose » dans la desserte de ses aéroports clés. Car si la France est à la manœuvre – Clément Beaune se disant « fier que la France se montre pionnière en la matière », elle avait néanmoins voulu préserver le statut de hub de Paris-CDG.

« La mesure initiale contenait deux dérogations en faveur des services aériens transportant une majorité de passagers en correspondance, ce qui, selon l’évaluation initiale de la Commission, aurait comporté un risque de discrimination et de distorsion de concurrence entre les transporteurs aériens », souligne le texte européen. Lequel précise ensuite : « La France ayant supprimé ces deux dérogations, les préoccupations concernant le risque qu’elles n’entraînent une discrimination et une distorsion de concurrence entre transporteurs aériens ont été levées ». Les dérogations seraient donc supprimées et le risque levé. Mais là encore, tout n’est pas si simple…

En effet, le parcours voyageur que baliserait aujourd’hui un report modal « brutal » de l’avion vers le train pour rallier l’aéroport de Paris CDG a pour l’instant édulcoré la mesure. Car les principales lignes qui devraient passer à la trappe échapperont au moins un temps à cette décision. « Les liaisons aériennes CDG-Lyon, CDG-Rennes et Lyon-Marseille ne relèvent actuellement pas du champ d’application de la mesure parce qu’une ou plusieurs des conditions énoncées à l’article 1er du projet final de décret ne sont pas (encore) remplies » indique le texte européen. « Toutefois, les autorités françaises indiquent que ces trois liaisons aériennes pourront tomber dans le champ d’application de l’interdiction dès qu’un opérateur ferroviaire aura amélioré les conditions de ses services (principalement en termes d’horaires proposés) », est-il précisé.

Quant aux lignes CDG-Bordeaux et CDG-Nantes, elles « ne relèvent pas et ne relèveront pas, selon les explications fournies par les autorités françaises, du champ d’application de la mesure sans une amélioration structurelle des services ferroviaires ». En clair, plus rien ne s’oppose à la suppression de ces dessertes aériennes auxquelles le train peut théoriquement se substituer en moins de 2h30. Si ce n’est que Paris-CDG, ce n’est pas Paris Gare de Lyon… La décision européenne a le mérite d’ouvrir la voie à une nouvelle feuille de route en matière d’intermodalité. Une feuille de route qu’il s’agira désormais de transmettre à la SNCF et aux compagnies ferroviaires qui doivent étendre l’éventail de choix dans le rail français.