Emmanuel Petit (Eklo) : « nous pencher plus activement sur la clientèle affaires »

Eklo vient d'ouvrir un établissement à Roissy, avant un autre l'an prochain à la porte de Versailles. L'occasion de discuter avec Emmanuel Petit, son fondateur, des projets de ces hôtels économiques, écologiques et lifestyle.

Eklo s’implante ces jours-ci à proximité de l’aéroport de Paris CDG. Quels sont les autres développements à attendre ?

Emmanuel Petit – Après l’Eklo Roissy, nous ouvrirons cette année notre dixième établissement à Montpellier, en face de la gare TGV. Et nous avons maintenant l’ambition de doubler de taille dans les cinq ans à venir. Pour atteindre cet objectif et poursuivre notre développement, nous sommes d’ailleurs en train de finaliser une levée de fonds importante. Nous cherchons à nous implanter dans de nouvelles grandes métropoles avec pour cibles Nantes, Rennes, Strasbourg, Dijon et Marseille. En parallèle, nous souhaitons renforcer notre présence dans des villes où nous nous sommes déjà installés comme Bordeaux, Lyon ou Toulouse et naturellement en région parisienne, où il y a un vrai marché pour une hôtellerie économique qualitative. Pour l’instant, nous avons deux hôtels, à Roissy et Marne La Vallée et deux autres en préparation pour 2024, à la porte de Versailles et près de la gare Montparnasse.

Quel type d’hébergement un voyageur d’affaires retrouvera-t-il au sein des hôtels Eklo ? Comment votre offre se différencie-t-elle, par exemple, des auberges de jeunesse de nouvelle génération qui fleurissent ça et là ?

Emmanuel Petit – Depuis 2017, et l’ouverture de notre hôtel à Lille, nous avons décidé de développer une offre hybride, avec une grande mixité d’usage et de chambres. A l’inverse des auberges de jeunesse de nouvelle génération, nos établissements proposent peu de dortoirs et beaucoup de chambres privatives, la proportion étant de 80% de chambres classiques et de 20% d’hébergements atypiques, parmi ceux-ci des chambres famille de quatre personnes et des dortoirs, privatisables ou vendus au lit. Autre différence avec les « hostels », qui ont peu de chambres privatives mais plutôt haut de gamme et vendues entre 100 et 150 euros la nuit, nous voulons rester une solution économique, avec des tarifs agressifs.

Agrémenté de 150 chambres et de plusieurs salles de réunion, l’Eklo Paris CDG ouvre ses portes le 22 février (c) Ateliers Delannoy

Dans l’air du temps, votre concept hybride joue aussi sur les fondamentaux de l’hôtellerie lifestyle ?

Emmanuel Petit – En effet, notre concept s’organise aussi autour d’espaces de vie contemporains avec un bar-restaurant animé dans chacun de nos établissements. Nous avons aussi la volonté d’être ancré dans la vie locale. Ainsi, à Bordeaux, en plus du bar-restaurant, nous proposons aux beaux jours une guinguette de 500 m2 à l’extérieur de l’hôtel qui vit six mois de l’année avec une clientèle à 80% bordelaise. C’est vraiment quelque chose que l’on cherche à développer.

Economique, le concept d’Eklo est aussi et surtout écologique. Un positionnement qui n’est pas récent pour autant.

Emmanuel Petit – Nous avons même été précurseurs. Quand j’ai développé mes premiers hôtels en 2014, je les voulais déjà écoresponsables, avec des constructions bois, des circuits courts, un approvisionnement quasi exclusivement auprès de partenaires locaux. Depuis le début, nos bâtiments sont à faible consommation, le plus souvent raccordés au réseau de chaleur urbain, si possible avec des panneaux photovoltaïques, toujours avec des luminaires led et des économiseurs d’énergie dans les chambres. Autre exemple, notre hôtel à Toulouse a également un système de dalles actives permettant à un circuit d’eau de passer par les sols et plafonds pour le chauffage et le refroidissement de l’établissement. Le tout dans un quartier à faible impact carbone en plein développement, les Halles de la Cartoucherie, où 80% des constructions sont en bois.

Sobriété énergétique rime-t-elle avec tarifs économiques ?

Emmanuel Petit – Avoir une empreinte énergétique la plus faible possible va bien sûr dans ce sens. Mais réussir à garder des prix attractifs est le fruit d’un équilibre global sur lequel nous travaillons activement. Cela passe aussi bien par une consommation énergétique réduite que par des ventes via les OTA limitées ou encore des durées de séjour minimum à certaines périodes pour éviter d’avoir à refaire les chambres tous les jours. La philosophie de Eklo est de serrer au maximum nos coûts pour maintenir un prix de chambre intéressent pour nos clients.

Avec des ouvertures à Paris CDG ces jours-ci, bientôt dans l’enceinte de Paris Expo Porte de Versailles, la clientèle business devrait être de plus en plus importante pour votre groupe. Comment vous y préparez-vous ?

Emmanuel Petit – Ces ouvertures nous invitent en effet à nous pencher plus activement sur la clientèle professionnelle. Nous avons dès lors embauché un spécialiste en 2022 pour travailler cette cible et intégrer nos hôtels dans les circuits de distribution corporate.

Quant aux voyageurs d’affaires eux-mêmes, que leur offrez-vous ?

Emmanuel Petit – Nos hôtels proposent toujours, à côté des espaces animés, des lieux plus tranquilles où les professionnels nomades peuvent se poser pour travailler, organiser un rendez-vous ou faire une visio et rester autant qu’ils le veulent sans avoir à consommer. Mais nos établissements les plus récents disposent désormais de salles de réunion, pour une quinzaine de personnes à Lyon et une trentaine à Roissy. Pour sa part, le futur hôtel en préparation à la porte de Versailles, un gros porteur de 300 chambres, offrira des salles de séminaires pouvant accueillir des groupes d’une petite centaine de personnes. L’hôtel, qui aura aussi un beau restaurant en rooftop, sera un lieu attractif pour la clientèle professionnelle visitant les salons et la clientèle d’affaires de passage à Paris, le tout s’ajoutant à une clientèle loisirs puisque l’hôtel disposera d’une quinzaine de dortoirs et d’une trentaine de chambres famille.

A Toulouse comme à Lyon, vos hôtels sont implantés dans des quartiers en devenir. Est-ce l’angle du développement d’Eklo ?

Emmanuel Petit – Nous ne ciblons pas forcément ce type de quartier, mais surtout à être assez urbain. A Bordeaux, nous sommes au cœur de la ville. A Montpellier, l’hôtel sera en face de la gare Saint Roch. Par ailleurs, nous cherchons toujours des implantations proches des transports en commun, pour privilégier les mobilités douces. Dans ce cadre, même quand l’hôtel est un peu à l’écart du centre-ville comme à Lyon, il est accessible en 15 minutes en tram depuis la gare de La Part-Dieu.

La croissance de la marque Eklo passera-t-elle aussi par l’international ?

Emmanuel Petit – Pour l’instant, la France est notre priorité. Nous voulons d’abord asseoir notre chaîne au plan national, avant d’envisager un développement dans les grandes métropoles limitrophes, que ce soit en Espagne, au Portugal, en Italie ou en Belgique. Ce sont des cibles qui nous intéressent, mais ce n’est pas notre priorité à court terme. Nous commencerons peut-être à nous y intéresser d’ici deux-trois ans avant d’y être présent à la fin de la décennie.